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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Ville nouvelle

December 7, 2023 John Voisine
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The Fragmented Metropolis—Los Angeles, 1850-1930. Foreword by Robert Fishman. Robert M. Fogelson, University of California Press, 1967 (1993), 361 pages.

Cette chronique est la première d’une série de quatre (4) sur la ville de Los Angeles [1/4]

Los Angeles ne pourra jamais réclamer pour elle-même la tradition fondatrice d’une ville comme Boston ou New York, ou plus proche, d’une ville comme San Francisco. Mais ce qui lui manque dans la durée, elle le rattrape facilement et haut la main en histoire unique et contrastante par rapport à ces villes sœurs, autant celles de la côté est que de sa propre côte. Et ainsi que le montre Monsieur Robert M. Fogelson dans cette grande biographie urbaine, qui était aussi sa thèse de doctorat, la ville de Los Angeles sera toujours en mode boosterism. C’est une posture contagieuse adoptée avec enthousiasme autant par les élites que par les gens qui font de L.A. leur agglomération d’adoption, qui est dès le début la vaste majorité de la population.

Puisque même si son développement finira par la placer dans une catégorie à part, rien de ses origines n’allait favoriser cette croissance explosive qui entrainera son classement en première position des villes du Sud-ouest et du continent américain. Il fallut beaucoup de temps et d’intrigue politico-financière pour faire de l’agglomération un nœud ferroviaire. San Francisco allait toujours être naturellement connecté par les lignes transcontinentales et régionales, mais chaque ligne reliant Los Angeles devait s’arracher au mérite. Sans accès facile vers un port naturel en eau profonde, contrairement à San Diego, plus au sud, il aura fallu une lutte acharnée avec cette dernière pour que Los Angeles triomphe de cette rivalité. Ceci à une époque où l’accès aux marchés continentaux était uniquement par voies océanique et ferroviaire.

La transformation de L.A. est quelque chose d’unique dans l’histoire de l’urbanité. De simple pueblo sans avantage géographique manifeste, à boomtown fait d’un curieux mélange d’exploitation agricole, pétrolière et pétrochimique, avec une place d’affaire et de commerce, une (faible) base manufacturière et industrielle et à cause de son climat, qui à vue naitre l’industrie cinématographique est suffisant pour garantir sa mention dans les histoires d’amalgame urbain sans pareil. Toutefois, ce qui vol vraiment la vedette est le vaste territoire occupé exclusivement de résidences unifamiliales. En plus, avant même le nouveau siècle, les gens venaient de partout sur le continent, mais surtout du Midwest et du Nord-ouest américain, afin de profiter de la douceur et de l’égalité paradisiaques du climat. La première ville tournée vers le mieux-être des gens de classe moyenne fortunés ou qui avait les moyens de profiter de leurs retraites fut Los Angeles.

Sur les traces de The Fragmented Metropolis

En fait, dès que Los Angeles atteint les caractéristiques politiques et l’envergure structurelle d’une ville, soit au courant des années 1880, les élites de ce qui est rapidement en train de devenir une métropole font la promotion de L.A. comme la place pour venir vivre l’idéal du « rêve américain ». Celui-ci est l’archétype de ce que nous pouvons imaginer aujourd’hui, soit la résidence unifamiliale sur un lot de terrain bien a soi dans un petit développement plus ou moins prestigieux en banlieue de… mais c’est ici que Los Angeles se distingue de toutes les autres grandes agglomérations, puisqu’ici la ville s’identifie et se caractérise par sa banlieue. Il y a un centre-ville, et ce dernier joue un rôle dominant dans les affaires et le commerce, mais contrairement aux villes comparables du Midwest et de la côte Est américaine, ce centre ne devient jamais le lieu de prestige et de concentration de la richesse matérielle et culturelle de la ville. Les gens de Los Angeles retirent le plus de fierté de l’abondance de leurs quartiers résidentiels. Loin d’être une source de prestige et de fierté civique, le centre-ville est le quartier des immigrants qui, ayant été bloqué des alternatives, doivent y élire domicile dans des conditions qui les isolent en les coupant d’une base dans la ville.

Ce qui distingue Los Angeles des autres grandes villes de l’époque est la domination politique et culturelle des « native Americans » (né en sol américain et assimilable culturellement à la majorité blanche du moment). Même l’immigration est dominée par des Américains, surtout des états du centre et de l’Ouest américain. Et contrairement aux autres villes américaines où l’immigration est composée de gens d’Europe du Sud, central et de l’Est, selon les périodes, et cherchant à se construire une nouvelle vie, l’immigration interne qui arrive à L.A. durant cette époque est souvent caractérisée par des gens en milieu ou en fin de carrière et attiré par un morceau « of the simple […] well-rounded life ». Cette population « native » particulière, combinée avec des sources internes d’immigration, une population d’origine mexicaine très marginalisée et une petite population d’origine asiatique, donnera en finale une période totalement dominée par les préoccupations et les priorités de la majorité « native ». Il n’y a aucun doute que si L.A. est toujours la ville qui est l’anti-ville ou la ville-banlieue qui est aussi la métropole du rêve américain, ces premières décennies de fragmentation en sont à la racine.

Tags The Fragmented Metropolis, Robert M. Fogelson, Los Angeles, Metropolis, Urban history, Série LA

Great Expectations

January 9, 2023 John Voisine
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The Great Rent Wars—New York, 1917-1929. Robert M. Fogelson, Yale University Press, 2013, 421 pages [e-book lu sur plateforme Kindle]

Cette chronique fait partie de notre série Housing in NYC [3/5]

Les historiens marquent souvent l’Armistice et le traité de Versailles, qui ont signalé la transition entre l’époque des empires continentaux d’avant la Grande Guerre et celle de la montée des états nations suivant celle-ci comme étant aussi ceux qui signalent le début du siècle américain. Il faudra attendre la victoire sur les forces de l’Axe lors de la Seconde Guerre pour rendre cette position incontestable sur le plan international. N’empêche, il y a un domaine où les américains n’ont jamais vraiment été en mesure de mener par l’exemple ou d’acquérir un authentique leadership, et cela est sur le plan social. En effet, dès la sortie du premier conflit mondial, la majorité des pays de l’Europe occidentale s’attaquent sans répit et presque «scientifiquement» à la question du logement, autant sur le plan de la conception, des méthodes de construction et de la gestion. On y produira beaucoup, vite, et de façon innovante. Cela était bien plus qu’une réponse à la dévastation matérielle entrainée par la guerre; la plupart des pays y voyaient une façon de faire face aux transformations à la fois économique (nouvelles industries, nouveaux secteurs manufacturiers), politique (montée des mouvements collectifs de gauche et fasciste de droite) et sociale (nouvelle place des femmes, de la famille et de la gestion du travail) qui marquaient alors tous ces états au sortir du traumatisme de 1914-18. On allait créer du logement pour le plus grand nombre, et du coup, autant se faire que peut, entrer dans la modernité du nouveau siècle.

L’histoire de ce côté-ci de l’Atlantique a été différente. On se limite dans cet ouvrage de l’historien et professeur émérite en étude urbaine au MIT, Monsieur Robert M. Fogelson, à la crise du logement qui affecta New York et plusieurs autres grandes villes de l’État et du pays. Cette crise se caractérisait par une pénurie de logements pour les classes laborieuses et la classe moyenne précaire. Mais surtout, par l’utilisation de techniques autrement sauvage par ce qui semble la majorité des propriétaires à l’endroit de leurs locataires, sans contrepoids. Seule l’intervention temporaire de l’état retournera, après une décennie, un semblant d’équilibre.

Sur les traces de The Great Rent Wars

En raison du blocage américain très particulier sur les questions sociales, comme sur la mise en place d’une aide de l’état (des états ou fédéral), la lutte se coalisera autour d’une aide indirecte aux locataires : contre les augmentations abusives, pour la conservation du logement et surtout pour un assouplissement aux conditions contractuelles qui avantageait unilatéralement les propriétaires. Cette lutte sera d’une brutalité exceptionnelle et prendra principalement la forme de «rent strikes». Cette tactique ne pouvait en réalité fonctionner que si la quasi-totalité des locataires de l’immeuble participait. De plus, la majorité de ces actions de grèves étaient menées par des femmes, des mères de famille immigrantes dans des quartiers (Lower East Side, Brownsville, Harlem) à majorité juive d’Europe centrale ou de l’est, souvent de première ou deuxième génération. C’était aussi l’époque des grandes organisations syndicales du textile, et aussi la période où le Parti socialiste fera de véritables gains, autant au niveau municipal à New York et à Albany, à la chambre de représentant. Ces représentants socialistes au niveau de l’état seront éventuellement même expulsés de la chambre durant le Red Scare. Mais cela n’empêchera pas les autres représentants de comprendre que l’heure était à l’action. La pression politique était rendue intenable : il fallait venir en aide aux centaines de milliers, sinon des millions de locataires qui étaient pris à la gorge et acculés à la rue par leurs propriétaires.

Pour faire face explicitement à cette crise du logement (des augmentations arbitraires et des expulsions), les mesures de contrôle sur les loyers (uniquement les logements) et le maintien en place des locataires seront adoptées par l’État de New York en 1920, pour une période de deux ans. C’est d’ailleurs cette limite et la façon explicite d’être des remèdes à une crise qui feront qu’elles résisteront jusqu’en cour suprême. Elles seront reconduites (par tranche de un à deux ans) jusqu’en 1929.

Ce livre fait exhaustivement l’histoire de ces mesures; elles ont probablement sauvé New York d’une véritable révolution populaire au tournant des années 1920. Cette histoire mérite d’être mieux connue et les parallèles avec nos pathologies contemporaines dans le domaine sont de chaque page.

Tags The Great Rent Wars, Robert M. Fogelson, New York City, Housing, Série Housing in NYC

NYC Co-op Utopia

December 21, 2022 John Voisine
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Working-Class Utopias—A History of Cooperative Housing in New York City. Robert M. Fogelson, Princeton University Press, 2022, 384 pages.

Cette chronique fait partie de notre série Housing in NYC [2/5]

On a souvent l’impression que dans le domaine du logement, la forme coopérative est celle d’avenir… et là pour le rester longtemps*. En d’autres termes, même si les coopératives semblent la façon la plus juste, équitable et l’idéale pour loger une grande diversité de ménages, le mouvement coopératif en habitation n’arrive pas tout à fait à prendre son envol et à se normaliser. Elles se font rares dans nos quartiers centraux et quasi inexistantes ailleurs. Même à l’intérieur de la catégorie des logements «sociaux et communautaires», ils représentent un peu moins du quart des logements. Compte tenu du manque criant en logement et surtout en logement collectif urbain, on peut s’étonner que les exemples de logements coopératifs soient toujours aussi rares et exceptionnels.

Si le rêve est vraiment un jour de voir s’éteindre le motif du profit comme moteur de développement dans le secteur du logement, pourquoi ne pas regrouper, au sein de coopératives, les initiatives pour la production de logements destinés aux nombreux paliers au sein de la classe moyenne? Avec comme premier catalyseur certains mouvements collectifs, tels les syndicats ou des regroupements d’intérêts et en appui, les groupes de ressources techniques (GRT) et de meilleures garanties financières et réglementaires gouvernementales, cela devrait depuis longtemps être habituel et normal, non?

En fait, ce n’est pas pour rien que le mot utopias est contenu dans le titre de ce tout nouvel ouvrage de Monsieur Robert M. Fogelson, historien et professeur émérite en étude urbaine au MIT. Ainsi, même si ce récit des triomphes et des malheurs des pionniers du mouvement coopératif en habitation à NYC se déroule à une époque et dans un contexte maintenant relégué à la mémoire de très rares personnes encore en vie, le lecteur avisé y trouvera plusieurs réponses à savoir pourquoi nous ne vivons toujours pas dans cette utopie d’abondance en habitation coopérative pour les classes moyennes et «laborieuses». Il a pourtant existé un moment, un bref moment durant les décennies 1950-60-70, où l’alternative coopératif semblait viable. Cet ouvrage est plutôt le récit des forces, internes et externes, qui ont fini par faire dérailler cette ambition.

Sur les traces de Working-Class Utopias

Working-Class Utopias retrace l’histoire et va plus loin dans les archives et les témoignages des personnages clés du mouvement coopératif en habitation de l’avant Deuxième Guerre, mais surtout, durant les décennies de l’après-guerre et jusqu’à l’implosion du mouvement, à la fin des années 1970. Après avoir brièvement relaté les origines des grandes réussites d’avant 1945, comme les Amalgamated Houses et Dwellings, l’auteur nous guide à l’intérieur des espoirs sincères et des ambitions démesurées de ceux (ce sont tous des hommes) qui ont réussi à construire ces ensembles coopératifs. Au centre de la mobilisation, une coalition unique, la United Housing Foundation (UHF), avec a sa tête Abraham E. Kazan, celui-là même qui avait mener à bien les Amalgamated et qui était impatient de poursuivre sur cette lancée. L’alignement entre l’UHF et les politiques fédérales (Title I, Housing Act of 1949), de l’état (Mitchell-Lama) et de la ville (allégements de taxes) seront le moteur de la production d’autant de logements coopératifs dans NYC après 1950. Les exemples de cette période sont tous héroïques (Rochdale Village, Penn South, etc.). Mais très vite, autant sur le plan architectural (monotonie), de l’implantation urbaine (mégas ilots) et sociale (ségrégation), les réalités de ces nouvelles formes massives finiront par briser le consensus social et politique ainsi que les coalitions d’intérêts locaux qui permettaient leurs réalisations.

En fait, pour réussir à implanter ces ensembles, l’UHF devait s’associer à l’une des figures emblématiques des politiques de dégagement urbain, Robert Moses; l’éclipse de son pouvoir, au milieu des années 1960, signale aussi celui d’une partie des projets qui en dépendent, comme ceux de l’UHF. Mais comme ce livre en fait le cœur de sa démonstration, ce qui brisera définitivement l’élan coopératif, du moins dans sa capacité à fournir du logement à l’échelle d’une «ville dans la ville», est Co-op City, dans le Bronx. Ce qui devait être le projet phare de l’UHF est finalement ce qui viendra ruiner, matériellement et moralement, l’entreprise coopérative. Pour l’essentiel, le livre nous donne à vivre les hauts et les bas de cette histoire, politique et économique, humaine et tragique, comme si l’on y était.


* Paraphrase de la fameuse formule “Le Brésil est un pays d’avenir, et qui le restera longtemps”, attribué à l’homme politique français du début du 20e siècle, George Clemenceau.

Tags Working-Class Utopias, Robert M. Fogelson, NYC, Coopératives, Coop Housing, United Housing Foundation (UHF), Abraham Kazan, Série Housing in NYC

La face cachée des rêves

April 21, 2022 John Voisine
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Bourgeois Nightmares—Suburbia, 1870-1930. Robert M. Fogelson, Yale University Press, 2005, 264 pages

La question brûlante qui tenaillait les familles et les investisseurs des premières banlieues américaines était à la fois bien simple et complexe dans sa résolution éventuelle : comment assurer la permanence, l’intégrité conceptuelle et physique de ce nouveau coin de paradis résidentiel? Comment en assurer l’usage exclusif résidentiel et préférablement même unifamilial? Comment s’assurer que seules les «bonnes personnes», de caractère et de mœurs inexpugnables, puissent se construire dans ces nouveaux domaines qui poussaient partout sur les côtes est, ouest ou même au centre des États-Unis en cette fin de 19e, début 20e siècle? On parle d’une époque d’avant le zonage, souvent dans un territoire hors de toute gestion municipale. Pour comprendre les solutions apportées à ces questions, parfois surprenantes, moralement dépravées lorsqu’elles ciblaient des personnes, toujours restrictives et contraignantes, rien de mieux que le parcours offert dans ce livre, recherché exhaustivement et exposé clairement par Monsieur Robert M. Fogelson.

On pourra s’étonner que c’est dans le pays de la suprématie du droit de propriété, une notion si fondamentale qu’elle se trouve enchâssée dans un article de leur constitution, que s’est développé au fil des décennies une armature solide, autant privée (contractuel) que public (zonage) de contraintes et de restrictions robustes à ce droit. Ce livre porte essentiellement sur la période où la prévalence des restrictions venait du côté privé, codifié dans des documents contractuels (Covenants, Conditions & Restrictions, souvent abrégé en CC&R) signés au moment de l’achat du lot. En fait, avant 1942, l’essentiel des domaines de banlieue était simplement des lots de terrains pourvus de rues, d’un aménagement paysager plus ou moins sophistiqué, d’équipement sanitaire plus ou moins élaboré et offerts à la vente. L’heureux acheteur était ensuite responsable du reste, de la conception à la construction de sa nouvelle demeure.

On peut comprendre que ce montage du marché immobilier impliquait des risques assez fabuleux, autant pour le promoteur de l’ensemble des terrains (investissement majeur en amont) que pour l’acheteur (que ce soit une famille ou un investisseur-spéculateur). D’ailleurs, il n’était pas rare pour un développeur de ne pouvoir faire un profit qu’après la vente du dernier tiers des terrains.

Plus loin dans la lecture

On comprendra mieux alors le jeu délicat nécessaire à l’atteinte de ce double objectif : du point de vue du promoteur, maintenir la viabilité des terrains jusqu’à ce que la totalité soit vendue, et du point de vue de l’acheteur, maintenir la réalité matérielle d’une banlieue idyllique. C’est une époque avant les prêts hypothécaires 25-30 ans (il fallait amortir sur 3-5 ans), où l’achat d’un terrain et la construction d’une résidence unifamiliale représentaient un risque considérable, même pour les plus fortunés. C’est ainsi que pour juguler le glissement qui peut s’enclencher si l’une des parties compromet ce fragile équilibre, les clauses restrictives deviennent vite de plus en plus courantes et contraignantes, peu importe le discours culturel prévalant sur le droit de disposer à sa guise de sa propriété.

Loin de faire fuir les acheteurs, les clauses restrictives seront au cœur des campagnes de vente, du plus simple, avec quelques règles se résumant en une page jusqu’au livret réglementaire, avec des restrictions touchantes autant à l’aménagement, à l’architecture, à l’usage et à la «qualité» des acheteurs. À l’exception des wasps, tous les groupes humains et religieux seront, selon l’époque et le lieu, bannis des développements. Mais la pleine immoralité de ces restrictions tombera bien sûr sur les Noirs et les juifs, et dans certaines régions, les catholiques. Toute cette catégorie d’interdits sera prohibée à partir de 1917 par la Cour suprême (Buchanan vs Warley), mais il faudra attendre 1948 pour que la Cour (Shelley vs Kraemer) mette fin à leurs mises en application. Selon la localisation géographique, on pouvait assister à de grandes variations dans le type de restrictions, comme dans le cas de la grande région de Los Angeles avec l’interdiction de la prospection et de l’exploitation pétrolière, ou ailleurs avec l’interdiction d’animaux domestiques (poulets, vaches, chevaux, etc.) ou d’élevage (porcs, chèvres).

Avec le début des règlements de zonage, dans les années 1920 (SZEA et SCPEA), et le passage d’une époque où les subdiviseurs contrôlaient le marché à l’époque des promoteurs immobiliers (d’un J.C. Nichols à un W.J. Levitt), la nature et la variété des contraintes changent, mais demeurent robustes et efficaces, quoique souvent invisibles aux non-initiés.


La semaine prochaine, la série se poursuit avec Bourgeois Utopias.

Tags Bourgeois Nightmares, Robert M. Fogelson, Suburbia, Urban history, Restrictive convenants

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