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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

First Principles

November 22, 2021 John Voisine
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Urbanism Without Effort—Reconnecting with First Principles of the City. Charles R. Wolfe, Island Press, 2019, 177 pages.

Le titre de cet ouvrage contient, de façon bien innocente, un élément d’ironie quelque peu involontaire. En effet, si l’on était vraiment pour tenter d’appliquer la démarche proposée pour en arriver à un urbanism without effort, cela demanderait un travail sérieux, bien au-delà de ce qui est conventionnellement déployé. En d’autres termes, la création d’un nouvel urbanisme sans effort ne peut se faire sans avoir, au préalable, fait une démarche exhaustive de recherche et de compréhension approfondie; d’un lieu ou d’un type urbain, autant sur le plan du design, de l’analyse socio-économique et du volet historique. On se devrait ainsi d’aller plus loin que la synthèse et rechercher une authentique distillation du genius loci.

Loin de la formule facile, l’auteur préconise ainsi une démarche sensible, que celle-ci soit entreprise pour la compréhension d’un espace urbain en friche, d’un coin de rue, d’une place publique, d’un îlot, d’un bloc dévitalisé ou même de la totalité d’un quartier. Cette démarche est à l’opposé des formules basées sur une accumulation de précédent ou d’un «copier/coller» qui ne s’en tiendrait qu’à la surface d’un design. L’auteur, en posant qu’il existe des milieux urbanisés qui ont su se développer afin de générer un urbanisme favorisant les relations humaines, de commerces et du savoir, de façon naturelle et organique, nous invite à une observation attentionnée de ceux-ci. Préférablement, ce travail se fait physiquement, sur place, en personne, par le moyen d’un journal urbain photographique ou sketch, avant même d’être écrit.

Pour ne pas tomber dans le panneau du «précédentisme», l’auteur souligne l’importance de contextualiser toutes observations; il n’existe pas (ou tellement peu) de design, de dynamique ou de développement socio-économique urbain qu’il est simplement possible de reproduire en pièce détachée, ou de recréer matériellement ailleurs et de penser réussir les mêmes «conditions gagnantes» que l’original. Cela relève de la pensée magique, mais c’est aussi un chemin facile, quasi irrésistible, si la recherche de résultat à court terme est la seule priorité. L’auteur nous invite plutôt à considérer une approche «don’t try this at home» : ne pas imaginer calquer sans au préalable une bonne dose d’adaptation bidirectionnelle.

Sur les traces de Urbanism Without Effort

C’est ainsi cette capacité d’avoir une connaissance profonde, autant du milieu d’origine de l’élément ou du contexte emprunté que de son milieu urbain d’insertion ou de reproduction (l’approche bidirectionnelle) qui sera à la racine de toute intervention urbaine allant au-delà du simple placage. La capacité à créer une dynamique urbaine spécifique et originale demeure un des exercices les plus difficiles et complexes en urbanisme. Pourtant, lorsqu’on peut avoir la chance de voir et de vivre un espace urbain qui fonctionne, cela semble la chose la plus naturelle, organique et spontanée qui soit. Il s’en dégage même un «effortlesness» qui peut facilement, si l’on n’est pas attentif, rigoureux et ouvert dans l’étude, nous donner l’illusion que la simple addition de ses parties constituantes suffira pour transplanter une dynamique urbaine particulière.

L’auteur donne l’exemple de la Silicon Valley : aucun espace urbain «naturellement et organiquement» dynamique n’a atteint ce niveau sans une forte dose d’interventions, de type privé et public, diversifiée et bénévole, dans le but d’entretenir et de nourrir dans le temps cette vitalité unique. Cette partie est tout sauf «without effort».

L’auteur est généreux sur ses propres sources méthodologiques ainsi que de réflexion. Il est aisé pour le lecteur qui voudrait s’en donner la peine de poursuivre sur les chemins défrichés par ce volume. J’ai moi-même découvert Charles R. Wolfe lors de deux entrevues sur l’excellent podcast Talking Heaways. Il a aussi un blogue, et son dernier livre a paru cette année.

Une autre façon que l’auteur cherche à faire assimiler les qualités qu’il préconise dans un urbanisme dynamique est en le rapprochant du concept d’everyday urbanism. Il existe aussi un ouvrage synthèse du même nom. Pour étendre la notion de dynamisme urbain pour inclure toutes ses incarnations, je souhaite avoir la chance bientôt de lire Tally’s Corner et son histoire éphémère, si caractéristique de ces phénomènes.

Plusieurs autres références nous donnent le goût d’aller plus loin, mais en voici trois qui seront sur ma liste : J. B. Jackson, Joseph Rykwert, particulièrement son livre, The Seduction of Place. Finalement, un ouvrage qui semble mériter un détour : Tight Urbanism.

Tags Urbanism Without Effort, Charles R. Wolfe, Urbanisme, Aménagements urbain, Urban Design

Saving the Day

November 1, 2021 John Voisine
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Saving the City. The Challenge of Transforming a Modern Metropolis. Daniel Sanger, Véhicule Press, 2021, 300 pages. [Lu en format e-pub sur Apple Books]

On dit souvent que le journalisme peut être assimilé à une première version de l’histoire. Dans cette veine, Saving the City se veut une première version de l’histoire de Projet Montréal et des gens qui l’ont fait naître, exister et dans le meilleur des arrondissements, agir pour le bien de la collectivité. Le parti et ses membres peuvent maintenant se compter parmi les rares bénéficiaires d’une histoire à la fois très personnelle et politique de tous les acteurs ayant le moindrement agi sur le cours de son histoire ; de ses origines au milieu de la première décennie du 21e siècle jusqu’à ce printemps et le début de cette campagne électorale municipale qui s’achève.

Comme lecteur, le récit que Daniel Sanger a réussi à en tirer est des plus habile, fait d’une part de la connaissance unique qui vient avec le privilège d’avoir été un des participants de la première heure et d’autre part, de l’accès qui lui a été accordé par la suite par les principaux acteurs impliqués. Projet Montréal, comme tout parti ou mouvement, est avant tout une coalition de gens désirant trouver un véhicule afin de réaliser certaines politiques jugées être dans l’intérêt de la cité et du public. Mais au niveau municipal, surtout dans une ville politiquement complexe comme Montréal, les regroupements pouvant unifier autant les gens des arrondissements centraux que ceux de la périphérie (est ou ouest) sont rares, fragiles et éphémères. C’est la principale raison que dans l’histoire de Montréal, la plupart des coalitions se sont formées autour «d’hommes du moment», que ce soit Drapeau, Bourque ou Tremblay. S’ils existent même encore, après leurs départs de la scène, leurs partis municipaux deviennent rapidement des coquilles vides. La seule exception à cette règle a été le RCM, qui était une vraie coalition d’intérêts translinguistique (anglo-franco), avec une vraie présence «indigène» au centre, à l’est et à l’ouest de la ville.

Sur le plan politique municipal, dans notre monde contemporain, le seul parti qui réussit (mais pas tout à fait) à reproduire des éléments (fragiles) de cet assemblage porteur est certainement Projet Montréal, que d’aucuns appelle même un «RCM 2.0». À l’inverse, le RCM peut être figuré comme un «proto-Projet-Montréal» (p. 19).

Sur les traces de Saving the City

On présente souvent Projet Montréal comme la «créature» de Richard Bergeron, et même s’il est vrai qu’il en a été le chef fondateur, et qu’une partie des premiers adhérents ont été attirés par sa vision de tramways urbains partout, pour tout et comme solution à tout les maux de «mobilités», autant (sinon bien plus) de gens se sont regroupés dans le parti parce qu’il était essentiellement le seul véhicule pour une vision plus progressiste, éclairée et humaine du développement, de l’aménagement urbain et de l’urbanisme en général. En fait, c’est avec cette histoire à la première personne racontée avec brio dans Saving the City que l’on apprend ce que la plupart des gens, observateurs de la scène politique montréalaise devinaient bien «from the outside» : Richard Bergeron fut son propre pire ennemi et l’instrument presque unique de ses cuisants revers (qui furent aussi tragiquement ceux du parti).

Pour ajouter à ce portrait, je me souviens d’une présentation de lui à l’Institut d’urbanisme à propos de «son» réseau de tramway, devant un auditoire de futurs urbanistes, d’urbanistes et de professeurs. Normalement un auditoire conquis à ce type de projet en était sorti, si c’est possible, plus dubitatif et rebuté à l’idée. Il avait été fidèle à sa réputation, avec «one excessive long speech» (p. 221), «brilliant as ice, and about as warm too» (p. 10).

En fait, c’est finalement sans lui, en 2017, que le parti a réussi à former, de peine et de misère, une coalition en mesure de conquérir autre chose que l’arrondissement du Plateau. La course à la chefferie de 2016, qui a vu Valérie Plante prendre la gouverne du parti, fut des plus bizarres, personnelle et amère («Who the fuck is Justine McIntyre?» p. 274). Pas étonnant de lire après que même une personnalité remplie d’enthousiasme, d’énergie et d’un esprit volontaire comme Valérie Plante puisse en ressentir des effets qui se manifestent jusqu’à ce jour.

Saving the City est la lecture parfaite pour qui veut se faire une idée «from the inside» de la politique municipale dans une grande métropole comme Montréal. Un «page-turner» digne des meilleurs thriller urbain.

Tags Saving the City, Daniel Sanger, Politique municipale, Élection municipale, Urbanisme

Scènes de la vie municipale

October 18, 2021 John Voisine
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Introduction à la vie municipale québécoise. Sous la direction de Jean-Patrick Brady, Presses de l’université Laval (PUL), 2019, 233 pages.

Avec les élections qui approchent à grands pas dans trois semaines, je poursuis cette série de lecture d’ouvrages ayant tous comme thème principal la gouvernance municipale dans la province. Dans ce petit manuel qui dépasse vite sa facture didactique et « d’introduction » à la vie politique municipale, les auteurs des perspectives choisies pour dresser ce portrait de première instance démontrent une habileté heureuse à synthétiser et à faire avancer leurs thématiques respectives. Toutefois, si la lecture de ces textes donne une impression de faire du sur place, ou d’un avenir tout aussi incertain que le passé, remplit de frustrations et de ressources insuffisantes, cela n’est certainement pas attribuable à autre chose qu’au portrait réaliste de la politique municipale offert par l’ensemble.

Dans un premier temps, disons que tous les participants à l’ouvrage ont bien conscience d’écrire à peine un an après l’adoption du projet de loi 122, dite Loi visant principalement à reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs. Encore maintenant, en octobre 2021, les effets de cette loi sont très incertains, et même si le nombre des lois, chartes (de villes), codes (de la sécurité routière et municipale), règlements (un seul) et décrets touchés par cette loi est impressionnant, la vérité simple est que les effets ne se sont pas encore véritablement fait sentir. De plus, un des éléments les plus controversés intégrés à la législation (et demandé avec insistance par l’UMQ), soit le pouvoir d’abolir l’approbation référendaire, si les exigences réglementaires de participation publique sont respectées, semble faire chou blanc, trois ans après l’adoption de la loi.

Une des autres caractéristiques de la législation est justement de donner plus de responsabilités aux municipalités. Mais tout ceci sans faire la correspondance avec des moyens équivalents, ce qui permettrait de prendre en charge ces responsabilités croissantes. Dans ce répertoire, le cas des logements sociaux est particulièrement éloquent ; il y a en effet un renforcement des pouvoirs réglementaires (art. 13, dont Montréal s’est prévalue), mais les moyens financiers sont demeurés fermement entre les mains de la législature provinciale.

Sur les traces d’Introduction à la vie politique municipale québécoise

C’est donc un peu avant cette aube nouvelle (que l’on devine semblable à la dynamique, plus que centenaire, de subordination) que les huit chapitres présentent leurs matières. Mais loin de rendre ce matériel caduc, on sera heureux de parcourir un premier chapitre simple et efficace sur l’histoire du cadre législatif municipal, un autre sur les enjeux de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire ou, même si nous venons juste de lire un livre du même auteur sur la question, un autre sur le concept d’innovation municipale. Pour rester dans le domaine des idées familières, pour les avoir abordées dans cet espace, le deuxième chapitre mentionne l’acupuncture urbaine et l’urbanisme tactique comme moyens d’action (politique) dans l’espace urbain, tout en allant beaucoup plus loin sur ces manifestations actualisées du « droit à la ville ». Et comme pour faire suite au propos de Nettoyer Montréal, un texte fait de rappels surprenants est consacré aux suites de la commission Charbonneau et aux notions d’éthique et de déontologie (comme le souligne l’auteur, trop souvent confondue !) dans le monde municipal.

Un des chapitres les plus intéressants du volume, probablement parce qu’il était aussi très éclairant pour moi, est celui sur les moyens de développement économie utilisé par les municipalités (ou en leurs noms). Au-delà des politiques ou plans stratégiques implantés, cette question met en relief la dépendance des gouvernements municipaux et des administrations régionales (MRC) envers les initiatives ou les visées spécifique de la province. Pour le moment, une des rares échappatoires demeure une place dans le réseau (assez exclusif) des « villes créatives ».

Je l’ai évoqué, le point qui laisse sceptique dans la nouvelle législation sur les « gouvernements de proximité » est le silence sur les moyens financiers ; aucun nouveau pouvoir délégué substantiel. Il y a justement un chapitre qui fait ce contraste entre le vaste répertoire des « responsabilités municipales » (effectives ou potentielles) et les moyens datant d’un autre siècle (l’impôt foncier) mis à leurs dispositions des municipalités afin d’aller chercher des revenus. Nul besoin de souligner qu’un gouvernement, aussi « de proximité » qu’il soit, sans véritable indépendance financière, aura toujours de la difficulté à agir de manière pleinement responsable et autonome.

Tags Introduction à la vie municipale québécoise, Jean-Patrick Brady, Cadre législatif, Urbanisme, Aménagements urbain, Fiscalité municipale

Bilan et après

September 13, 2021 John Voisine
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Montréal en chantier—Les défis d’une métropole pour le XX!e siècle. Sous la direction de Jonathan Durand Folco, Écosociété, 2021, 256 pages. [Lu sur l’application Books]

Contrairement à la flexibilité que se permettent leurs homologues aux niveaux provincial et fédéral, la classe politique municipale du Québec doit composer, de façon quelque peu paternaliste, avec une loi qui leur impose des élections à jour fixe et sur une périodicité de quatre ans. Faisant probablement cause et tirant avantage de l’inévitable scrutin du 7 novembre prochain, les auteurs-es (sous la direction de Jonathan Durand Folco, qui introduit et conclut le recueil) utilisent trois grands thèmes (Habiter, Innover et Participer). Ils proposent des textes qui explorent et discutent des réalités urbaines montréalaises à la lumière du travail de la dernière administration municipale. Les enseignements qu’on pourra en tirer sont autant rétrospectifs que prospectifs, et ce toujours dans une optique qui fait sens en contexte montréalais.

Même si l’élection d’une majorité pour Projet Montréal (en 2017) fut pour plusieurs comme une bouffée d’air frais et un coup de balai nécessaire après quatre années d’une gouvernance curieusement rigide et autoritaire sous l’équipe du maire Denis Coderre, cela ne veut pas dire que les dernières années furent sans peine pour l’équipe de la mairesse Valérie Plante. Comme cela était aussi arrivé avec le maire Jean Doré du RCM, la mairesse a dû consacrer des ressources et un temps précieux à gérer des crises internes. De plus, comme l’histoire de la politique montréalaise nous l’enseigne, il est souvent aisé et sans conséquence réelle pour une nouvelle administration de revenir en arrière. Dans les circonstances, sans les quelques minces tentatives d’introduire un soupçon de progressisme dans les initiatives municipales qui caractérise le parti de Madame Plante à son meilleur, il est facile de concevoir comment un retour au pouvoir de l’ancien maire Denis Coderre serait tout ce qu’il faut pour signaler aussi un retour des politiques et stratégie conventionnelles et éprouvées (parfois même réductrice).

Face à cette possibilité très réelle d’un coup de barre à droite à l’échelle municipale et même métropolitaine, les textes de ce recueil forment un excellent condensé d’une perspective plus à gauche sur la situation économique, sociale et démocratique de l’univers urbain montréalais. Juste à temps pour réfléchir aux conséquences du prochain vote.

Sur les traces de Montréal en chantier

C’est avec un extrait paru dans La Presse, il y a quelques semaines, que j’ai eu connaissance de ce recueil. On aura judicieusement choisi de mettre en vedette un texte sur ce qui est maintenant permis d’appeler « l’éternelle » question du logement, sa disponibilité, son abordabilité et son accessibilité. Cette situation est endémique pour les villes « attractives » sur le plan économique (concentration des emplois), social (services et éducation) et culturel (arts, spectacles et musique) comme Montréal. Ce texte de la section Habiter combine bien les grandes forces et les quelques (rares) faiblesses du recueil. Ainsi, la façon d’aborder les questions soulevées se colle bien aux réalités montréalaises et a la manière qu’elles se sont présentées à l’administration Plante. Les auteurs font aussi un historique ainsi qu’un bilan des réponses avancées par son administration en termes de propositions stratégiques, politiques ou réponses réglementaires.

Il y a toutefois une tendance caractéristique à certains textes du recueil d’explorer un nombre limité de causes à une situation, à envisager des ajustements ou des solutions qui se situent dans une gamme étroite d’options consensuelles et progressiste confortable. Dans le cas spécifique du texte sur le logement à Montréal, la démonstration des effets pervers de la financiarisation (basé sur les travaux de Louis Gaudreau et d’Alan Walks) et des pratiques de la SCHL (assurance hypothécaire, titrisation) est bien établie et convaincante, mais encore ? Le texte ne contient, par exemple, aucun commentaire sur les effets des outils réglementaires conventionnels ; on pense ici au zonage, au lotissement, au stationnement minimum (au lieu de maximum) et à la densité ruineusement faible en milieu urbain. Ce sont pourtant là des outils pleinement sous le contrôle des administrations municipales et dont l’assouplissement permettrait d’activer un vaste potentiel pour la création d’une richesse diversifiée (usage intensifié et mixte, patrimoine recyclé) et urbaine.

Je ne voudrais toutefois pas laisser l’impression que ce texte sur le logement, ou n’importe lequel des thèmes abordés (espaces publics, mobilité, fiscalité, démocratie locale, etc.) ne donnera pas, à tout lecteur qui voudra bien s’y attarder, une abondance de pistes fertiles pour (re) penser nos réalités urbaines montréalaises.

Le texte de cette revue a été publié le lundi 27 septembre 2021.

Tags Montréal en chantier, Jonathan Durand Folco, Urbanisme, Fiscalité municipale, Mobilité

La méthode du bannissement

May 17, 2021 John Voisine
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Ville contre automobile—Redonner l’espace urbain aux piétons. Olivier Ducharme, Écosociété [Collection Polémos], 2020, 195 pages.

C’est une sagesse acquise à prix fort : lorsque l’objectif est l’assassinat du tyran, mieux vaut ne pas manquer son coup. Ce court volume d’Olivier Ducharme est certainement de ceux avec cette noble ambition, soit de mettre un terme et de déposer une fois pour toute le régime tyrannique qu’exerce l’automobile (et sa retenue) sur nos villes.

Cette tyrannie est réelle et se manifeste entre autres par l’étau des aménagements autoroutiers et notre acceptation de ces infrastructures sous le couvert de la nécessité économique, du « progrès » et de la « croissance » de la richesse collective. Cette présence de l’automobile imprègne aussi nos cadres bâtis, transformant l’environnement urbain en annexe de garage. Avec l’automobile comme fonction première à résoudre dans l’espace urbain, ceux-ci sont vidés de la capacité à servir d’espaces utiles, pratiques, fonctionnelles et à échelle humaine. Évidemment, ceci est vrai sans même toucher aux questions du gaspillage des ressources, des changements climatiques et de l’appauvrissement forcé des classes moyennes engendrés par la nécessité de posséder une automobile pour faire de notre urbanité un univers le moindrement accessible.

L’ouvrage de Monsieur Ducharme trouve son originalité dans sa genèse historique et intellectuelle des justifications concernant cette présence omnipotente de l’automobile, en Amérique, mais particulièrement au Québec. Plusieurs passages traitent aussi des luttes citoyennes (et des groupes centrés autour du vélo), à Montréal et Québec, contre cette logique des envahissements autoroutiers. La déconstruction de l’argumentaire absurde des gouvernements québécois successifs, sur la nécessité d’un passage aux véhicules électriques comme courroie de la « transition énergétique », si essentiel aux objectifs de réduction des GES, est particulièrement cinglante et réussie. Pas de doute possible, « [o]n se tire dans le pied » en s’enfonçant dans cette voie.

C’est par contre avec un peu de tristesse que l’on constate, en dernière analyse, que la méthodologie proposée pour mettre fin à la tyrannie automobile et « [r]edonner l’espace urbain aux piétons », relève elle-même de la pensée magique, avec même un peu plus qu’un soupçon de penchant tyrannique : le bannissement pur et simple de l’automobile de la ville. La viabilité de cette proposition, en société démocratique, semble douteuse.

Sur les traces de Ville contre automobile

J’ai entendu parler de ce livre pour la première fois il y a quelques mois, en lisant cet article du journal La Presse. Je savais immédiatement que je voulais le découvrir plus à fond, même s’il me semblait avoir saisi les limites de la proposition par les propos de la chronique.

Olivier Ducharme affirme, en introduction, qu’il a fondé sa pensée sur les idées de Paul Goodman, un intellectuel américain qui, de l’aveu même de l’auteur, a perdu en influence depuis son décès en 1972. Je dois admettre n’avoir jamais entendu parler du personnage. Un des ouvrages cités (et co-écrit avec son frère, Percival Goodman, un architecte) est Communitas—Means of Livelihood and Ways of Life. C’est le critique bien connu Paul Goldberger qui en signe la préface et commente : « Rich in splendid observations, many of which foreshadow issues which have become all the more urgent today ». Certainement des auteurs mûres pour une redécouverte contemporaine.

Lorsque, vers la fin de son ouvrage, on regarde sérieusement l’idée d’une reconceptualisation des espaces urbains sans automobiles, l’auteur puise à travers des sources bien connues des urbanistes. Il est donc question de livres comme Suburban Nation ou Walkable City, que je compte éventuellement commenter ici dans le cadre de séries appropriées.

En passant à travers les ressources citées, j’ai été surpris de découvrir qu’un ouvrage aussi fondateur que The Next American Metropolis—Ecology, Community, and the American Dream, de Peter Calthorpe, n’est plus activement publié par son éditeur d’origine et n’a pas été repris. Trente ans est vraiment une longue période dans le domaine de l’édition.

Le nom de David Owen est familier pour qui aime un article de fond ou deux du New Yorker sur un sujet d’actualité touchant le domaine de l’environnement. Ici, Olivier Ducharme le cite principalement pour son livre (traduit) : Vert Paradoxe—Le piège des solutions écoénergétiques. Difficile de trouver un livre qui s’harmonise mieux avec le propos général de son ouvrage. Dans les milieux urbanistiques, David Owen est surtout connu pour Green Metropolis—Way Living Smaller, Living Closer, and Driving Less are the Keys to Sustainability. L’argumentaire portait sur New York, Manhattan en particulier. On y reviendra au cours de l’année, dans une série sur les métropoles.

Tags Ville contre automobiles, Olivier Ducharme, Automobile, Urbanisme, Autoroutes

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