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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Growth Pains

January 4, 2024 John Voisine
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The Reluctant Metropolis—The Politics of Urban Growth in Los Angeles, with a new afterword by the author. William Fulton, The Johns Hopkins University Press, 1997 (2001), 407 pages.

Cette chronique est la deuxième d’une série de quatre (4) sur la ville de Los Angeles [2/4]

Après avoir constaté, avec le premier ouvrage revu, que les quatre-vingts premières années (1850-1930) de Los Angeles sont marquées par la fragmentation, l’ouvrage de cette semaine nous raconte l’histoire plus contemporaine de la métropole de rêve. Pour une bonne partie du 20e siècle, Los Angeles est la métropole d’une croissance qui fait rêver, souvent idéalisée; pas une fiction ni une fantaisie, mais plutôt un réel cadré sous une lumière idyllique.

Il n’y avait plus de limites durant la décennie 1950, on profite des fruits de ce labeur durant la décennie 1960 (tout en commençant, en marges, à réaliser que tout n’est pas rose au pays de la croissance sans limite) et finalement les années 1970 sont celles où, dans plusieurs domaines, on est après tout forcés, presque malgré nous, d’appliquer les freins. Dans le contexte de Los Angeles, cela veut dire un début de questionnement et de résistance face aux « Growth Machines » (1) qui caractérisait le consensus métropolitain de cette immense région du sud de la Californie qu’elle nourrit avec cette croissance.

Mais quand on commence à remettre en question les vertus d’accélérateur et de lubrifiant universel de la machine de croissance urbaine, il faut s’attendre à constater de plus en plus de bris et ruptures d’engrenages. C’est pourquoi les années 1970, avec l’apparition du mouvement slow growth, qui fait des gains dans certaines municipalités phares de la région, comme Santa Monica, auront des répercussions profondes et contradictoires sur l’ensemble de la métropole. Le consensus autour de la croissance est certainement remis en cause, et surtout le consensus autour de qui profite, qui est laissé pour compte et qui est ignoré lorsque l’enveloppe poussée par la « growth machine » fait sa tournée. Cette réalité est éclatée une fois pour toutes, mais puisque rien ne vient remplacer ce qui est aussi une machine à bâtir des consensus, parfois de type « gagnant-gagnant », parfois de type « donnant-donnant », tous les intervenants sont abandonnés à leurs ambitions. Sans le couvert politique ou idéologique de l’intérêt commun, le stress sur le système devient intenable.

Comme le démontre Monsieur William Fulton dans cette histoire urbaine des forces politiques, idéologiques et économiques des trente dernières années à Los Angeles, la perte de consensus autour de la growth machine a le double effet d’en exposer les contradictions et de rendre l’ensemble toujours plus « reluctant » (hésitante, rébarbative) à travailler dans le sens d’un intérêt commun; d’autant plus qu’il devient difficile à identifier.

Sur les traces de Reluctant Metropolis

Un des éléments qui viendra introduire des distorsions massives dans un système déjà fragile est la victoire référendaire, en 1978, de la proposition 13, bien connu en Californie comme Prop 13 (2). C’est l’incarnation même de l’expression « be careful what you wish for ». En fixant le taux de taxation municipal (commercial et résidentiel) à la valeur de l’immeuble en 1976 (3), on venait couper drastiquement le financement des gouvernements locaux et des entités semi-régionales (L.A. County), qui doivent respecter la même règle. Plusieurs (la vaste majorité) des services sociaux de proximité sont administrés au niveau du county, qui englobe aussi plusieurs gouvernements municipaux. En plus des coupes et de la réduction engendrées dans les services, il s’ensuivit une course vers les sources nouvelles de revenus. Dans ce sillage, des distorsions horribles dans la manière de gérer et surtout de générer la croissance, seule source potentielle de nouveaux revenus. Le taux d’un immobilier existant étant figé, rapportant de moins en moins avec le passage de chaque année, il fallait constamment générer un nouveau parc immobilier, ce qui n’est pas toujours facile. C’est alors que les villes ont jeté leur dévolu sur un outil jusqu’alors peu utilisé : la taxe de vente locale. Mais idéalement, les gens que l’on voulait attirer pour payer cette taxe devaient provenir de l’extérieur de la ville, d’où l’explosion des mégacentres (« big-box retail ») régionaux, générateurs de « sellscape » et autres corridors autoroutiers de la vente. Pour renflouer la trésorerie locale, on allait inciter les gens à venir acheter en masse et ainsi contribuer à la taxe locale. Toute croissance devient parasitaire.

Depuis la mise en place de Prop 13 à la fin des années 1970, la métropole de Los Angeles et sa région, mais aussi tout l’état de Californie, est sans doute subtilement défigurée sur le plan urbain et social par ce régime de taxation. Mais c’est Los Angeles, en raison de sa taille et de sa population, qui de loin en subit les pires contrecoups. Les distorsions que cela engendre dans le paysage de la mégalopole sont malheureusement trop souvent interprétées comme les conséquences « naturelles » ou même désirables par les agglomérations souhaitant atteindre une telle échelle. En cherchant à émuler la croissance « à la Los Angeles », l’on se trouve à importer des déformations particulières au contexte de cette ville. Pour se donner la chance de réfléchir un peu à ces situations difficiles, Reluctant Metropolis est le meilleur des compagnons.


(1) Reprise ici de la notion des Growth Machines telle qu’exposée dans l’ouvrage de John R. Logan et Harvey L. Molotch, Urban Fortunes. Nous y reviendrons au cours des prochaines semaines;

(2) Pour un aperçu de la proposition « from the inside », lire cette page de la Howard Jarvis Taxpayers Association. Pour ma part, je crois enfin avoir trouvé l’ouvrage qui décortique ce mouvement et nous y reviendrons;

(3) L’évaluation municipale est remise à jour en cas de vente, de rénovation majeure sur le bâtiment ou de construction majeure sur le terrain du bâtiment existant;

Tags The Reluctant Metropolis, William Fulton, Los Angeles, Growth Machine, Urban Economy, Série LA

Une fois pour toute

March 17, 2022 John Voisine
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Triumph of the City—How Our Greatest Invention Makes Us Richer, Smarter, Greener, Healthier, and Happier. Edward Glaeser, Penguin Books, 2011, 338 pages.

Chacun a sa façon bien particulière d’exprimer son amour. Si on devait s’imaginer une lettre d’amour à la ville et à la notion même d’urbanité de la part d’un économiste, le livre d’Edward Glaeser incarne certainement un idéal qui s’en rapproche. Comme on peut l’anticiper d’un représentant de cette profession, cela se fait avec une armature comptable assez appuyée et inévitablement quelques angles morts. Mais dans ce cas particulier, la comptabilité est le plus souvent mise au service d’une démonstration assez crédible et les angles morts sont plutôt les manifestations de préférences idéologiques assumées et sans malice.

Si le titre pouvait laisser un certain doute, pour qui aimerait y voir une boutade mordante, le sous-titre vient immédiatement dissiper toute ambiguïté. La ville est ici la meilleure invention de l’humanité, engin de richesses, centres de toutes formes de création, d’innovation et catalyseur d’enseignement de pointe. Grâce à leurs diversités, les villes sont des milieux productifs sur les plans économique et humain. Lorsque mariées à la densité, elles sont génératrices de milieux aménagés et naturels sains et durables. Avec la concentration des meilleurs soins préventifs et curatifs, elles sont porteuses de populations en santé et dynamique. Comme si ce n’était pas assez, le taux de bonheur y est élevé, probablement un facteur des nombreuses opportunités.

Même les aspects les moins réjouissants de certaines villes contemporaines, comme les quartiers défavorisés (bidonvilles et autres types de ghettos) sont dépeints, avec justesse, comme autant de zones de croissance potentielle pour la ville elle-même, mais surtout pour les populations qui s’y trouvent. Mais que dire lorsqu’on fait face à des villes entières sur le déclin ou sous l’emprise d’une corruption si massive que sa population est laissée à elle-même? En fait, si certains cas semblent irrémissibles (Detroit?), des effets de cycles sont souvent à la racine d’affaissement temporaire (NYC des années 1970), et il est plus souvent qu’autrement possible de renverser la vapeur. Comment? En investissant dans le capital humain (existant ou par l’immigration), ce qui encourage parfois une renaissance sur des bases nouvelles (innovations, inventions, entrepreneurship, etc.). Si cela ne change rien? L’auteur propose la notion de «Shrinking to Greatness».

Sur les traces de Triumph of the City

On l’aura deviné, cette dernière proposition, qui réserve plus de «shrinking» que de «greatness», est une de ces fausses solutions que seul un économiste peut aimer. Mais ceci n’est pas l’essentiel de l’argument de M. Glaeser, tant s’en faut. Il prend au contraire la peine de démontrer, recherches originales et statistiques à l’appui, que même les zones où règne misère et pauvreté, presque synonyme de certaines agglomérations, sont bien plus des représentations de la force de ces villes en tant que générateur de richesse. En Asie par exemple, l’auteur démontre longuement comment d’autres de ces villes ont réussi à tirer profit de sur leurs réseaux et de leur capital humain, comme Bangalore dans le domaine des technologies ou de façon quasi sui generis, comme dans le cas de Singapore. Le cas de Hong Kong n’est malheureusement plus aussi fertile et limpide qu’au moment de la parution du livre, mais cela n’enlève rien à ce qu’elle était devenue avant les répressions chinoises. Au contraire, la résistance féroce de la société civile à celles-ci est une illustration limpide de la force des villes.

Curieusement, c’est lorsque le regard se porte sur la situation des villes américaines qu’on notera plus de raccourcis. Le fait que les villes côtières soient contraintes sur le plan de l’abordabilité et de la disponibilité du logement est bien connu et documenté, mais montrer du doigt les efforts des défenseurs du patrimoine est peu crédible. Questionner le zonage est légitime, mais il ne faut pas oublier que cette réglementation représente une volonté politique et populaire. Le nimbysme est un fléau, mais que font-ils d’autre que d’utiliser les mécanismes en place? Il est aussi question des bénéfices mythiques de la ville sans zonage et des miracles du laissez-faire caractéristique de la région du Sunbelt. Heureusement, plusieurs autres exemples de succès urbains (européen et américain) sont décrits avec verve, nuance et conviction et ne reposent pas uniquement sur l’attraction du «cheap».

L’auteur donne la meilleure version de son idéologie d’attache (il est Senior Fellow au Manhattan Institute), et même si l’on préférait un meilleur questionnement sur certains points, il est bon de lire un fervent plaidoyer urbain en provenance du côté droit de l’assemblée.


La semaine prochaine, une forme de suite : chronique du livre Survival of the City, qui tient compte de nos réalités urbaines en transformation, et des perceptions changeantes sur la façon d’occuper durablement nos villes.

Tags Triumph of the City, Edward Glaeser, Urban Economy, Urban sociology, Urban Design

Urban Swindle

February 24, 2022 John Voisine
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Big-Box Swindle—The True Cost of Mega-Retailers and the Fight for America’s Independent Businesses. Stacy Mitchell, Beacon Press, 2007, 336 pages. [Lu sur application Kindle]

Il y a certainement plusieurs causes pour le dépérissement économique et la déstructuration fonctionnelle des «main streets» (rues principales) traditionnelles et dans une moindre mesure, des centres-villes. Mais parmi celles qui s’échappaient un peu trop souvent à bon compte, on retrouve les grandes surfaces, plus communément identifiées comme les «big-box» ou mégachaînes de ce monde, à la Wal-Mart, Home Depot, Costco et les quelques autres dans cette ligue. 

Mais comment leur faire un tel reproche? Ces chaînes ne proposent-elles pas tout ce que le citoyen-consommateur veut, où et quand il le veut, et au meilleur prix? Leur efficacité et leur génie logistique ne sont-elles pas mises au service des meilleurs prix, en tout temps et en toute saison? Est-il vraiment pertinent, de la part des autorités publiques (municipales, régionales et provinciales), parfois alertées par des groupes de citoyens, d’être vigilant et sceptique face aux promesses de progrès et de croissance économique faits par les mégachaînes? Si ces commerces offrent autant de bénéfices, pourquoi demandent-ils toujours des contributions, des concessions ou des subventions (directes ou indirectes) de la part des municipalités ou de la province? Les autorités n’auraient-elles pas intérêt, dans leurs schémas et plans d’urbanismes (vision d’aménagement) et de manière opérationnelle dans leurs réglementations, à tenter de limiter l’envergure ou d’encadrer l’installation de ces mégachaînes dans leurs régions?

Même si ce livre a été publié en 2007 et rend compte d’une situation en évolution avant cette date, l’analyse des conséquences d’un développement axé autour des mégachaînes est plus que jamais d’actualité. On reconnaîtra les moments cruciaux où différents groupes, aux intérêts parfois divergents (chambres de commerces, de préservation du patrimoine, de promotion artistique), ont commencé à comprendre que les mégachaînes constituaient plus qu’une simple menace commerciale, mais représentaient surtout une forme économique essentiellement extractive, sans valeur ajoutée locale ou régionale. Il en découle donc souvent, pour les villes et régions visées, une forme de nivellement par le bas accompagnée d’un désinvestissement, d’une perte dans la diversité et la résilience de l’activité économique et sociale locale, le tout associé à une dévitalisation des centres économiques locaux (centres-villes, rues principales et commerciales).  

Sur les traces de Big-Box Swindle

Un des avantages de l’ouvrage est de remettre sur la table les efforts des gens d’une autre époque, confrontés aux effets négatifs des grandes chaînes. Dans les années 1920-30 aux États-Unis, plusieurs interventions, dont le Robinson-Patman Act au niveau fédéral, avaient réussi à contrôler l’emprise des grandes chaînes (comme Woolworth et A&P). D’autres efforts militants étaient parvenus, entre autres par la syndicalisation, à améliorer substantiellement la condition de leurs travailleurs (surtout dans le domaine alimentaire). En 1946, il y a même eu des audiences devant un «Special Committee to Study the Problem of American Small Business», au Sénat américain. Les études publiées dans le cadre de ces audiences démontraient la force et la valeur d’une économie locale qui prend racine dans sa communauté. Quand la croissance peut se faire à partir de noyaux urbains (centres-villes, rues principales, artères commerciales), il en découle souvent une participation civique plus vigoureuse, une meilleure capacité à créer de la richesse (matérielle et foncière) sur le long terme, avec une diversité d’acteurs et généralement un plus grand capital social dans la communauté.      

L’installation de mégachaînes (mégasurfaces + stationnements) occasionne un effritement de ce capital. Les mégachaînes, de par leurs tailles, jugulent, étouffent et engendrent la ruine de l’écosystème économique local. Pour y parvenir, il y aura l’utilisation, par ces mégachaînes, de bas prix extrême sur des articles phares et, sous un même toit, une offre commerciale extensive afin de capturer la totalité de celle-ci à l’échelle régionale. En parallèle, on assistera à une perte d’emplois solides et une diminution globale de la masse salariale. 

Il n’est pas sorcier de reprendre le contrôle, et ce livre est une excellente source d’exemples et de démarches ayant porté des fruits. Ces dernières années, l’auteure et son organisation ont été très présentes sur cette scène. Une recherche sur un site Web de nouvelles (NPR) et un autre faisant cause commune (Strong Towns) offrent autant de ressources pour actualiser l’ouvrage. 

La difficulté est toujours la même, celle d’une action collective profitable à tous, mais pas sur le même horizon temporel (ou jamais). Même une métropole comme Montréal devra faire face à des dommages importants à l’écosystème urbain de son centre-ville et à ses artères commerciales si un projet comme le Royalmount se concrétise. 

J’ai fais une chronique du livre et mouvement Strong Towns ici (2020/11/16)

Note : les prochaines chroniques seront maintenant publiées les jeudis de chaque semaine.

Tags Big-Box Swindle, Stacy Mitchell, Big-Box retail, Downtowns, Urban Economy

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