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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Après la tempête

March 25, 2022 John Voisine
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Survival of the City—Living and Thriving in an Age of Isolation. Edward Glaeser and David Cutler, Penguin Books, 2021, 480 pages [E-book lu sur l’application Kindle]

À l’heure de la pandémie de COVID-19, qui s’en va vers une sixième vague, nous ne serions déjà plus à l’ère de l’interconnexion planétaire, mais plutôt dans cette nouvelle forme de communication faite d’isolement physique et de transparence digitale. Ainsi, loin de revenir en mode du pendulaire métro-boulot-dodo et de l’occupation collective des espaces à bureaux et des centres-ville, nos routines sont ponctuées de contacts virtuels, de réunions par écrans interposés et de rare face-à-face. Du moins, pour les professionnels et les corps de métiers qui peuvent se le permettre.

Malgré ce nouvel état des lieux, la ville en tant qu’espace dynamique de concentration du meilleur des activités humaines ne se laissera pas déloger de sitôt. D’autant plus que dans la plupart des villes du monde, c’est justement une fois confronté au virus que les autorités locales de santé publique et d’aménagement ont coordonné des réponses à la fois rapides, efficaces et parfois même assez courageuses et originales (sur le plan du commerce local et du partage de l’espace public) afin de permettre une poursuite sécuritaire des activités qui pouvaient l’être.

Les deux auteurs de l’ouvrage, les économistes Edward Glaeser et David Cutler, ont un profil qui est particulièrement bien adapté à la présentation d’une analyse cohérente des défis et du potentiel engendré par la pandémie; le premier étant un économiste urbain de l’école de Chicago et l’autre, un spécialiste du système de santé américain. Le bagage et le filtre limité de ces domaines pourraient, entre d’autres mains, limiter le portrait offert au lecteur, mais il n’en est rien. La combinaison des domaines de connaissance recoupe au contraire presque parfaitement les sphères d’activités les plus touchées et transformées, peut-être à jamais, par cette pandémie : l’économie dans son ensemble (mais spécifiquement urbaine) et nos systèmes de soins et de santé publique.

Ce n’est plus un grand secret pour personne maintenant, mais les pays et les villes qui s’en sont le mieux tirés (calculé comme un faible taux de mortalité) sont ceux qui avaient aussi investi dans une infrastructure de santé publique expérimentée et conditionnée à être mobilisés au moindre signe de contagion sérieuse (de personne à personne).

Sur les traces de Survival of the City

Ce livre va chercher loin dans l’histoire et le temps pour démontrer les raisons et la logique derrière cette stratégie gagnante. Le mythe de la ville et des espaces urbain comme intrinsèquement source de contagions et de propagation de tous les maux et maladies infectieuses est de cette façon entièrement démasqué. On lira avec plaisir l’histoire de la lutte urbaine contre ces fléaux, qui se faisait même bien avant d’avoir une véritable compréhension de ce qui provoquait la contagion (comme la théorie des germes ou la transmission par aérosol). Ainsi, un investissement continu (avant et après un choc pandémique) dans une infrastructure solide et universelle de santé publique (peu importe le niveau économique et social ou l’état civil, citoyen ou immigrant) est le seul vrai gage d’une lutte gagnante contre une future pandémie.

Les auteurs font une grande place à la perte des «d’opportunités» dans les villes. Bien entendu, il y a eu de lourdes pertes d’opportunités entraînées par la pandémie, mais selon les auteurs, c’était aussi le cas avant la COVID-19. Cette ligne argumentaire sera familière pour qui est le moindrement attentif à certains cercles intellectuels prônant une plus grande flexibilité dans l’économique (comme les libertariens, dont les auteurs se réclament). Un ouvrage de base, souvent cité (même dans ce livre) et qui résume cette position est The Rise and Decline of Nations (Olson); essentiellement, nos sociétés tomberaient inévitablement en sclérose dans nos façons d’organiser les pouvoirs collectifs et individuels. Cette situation finit par donner tout le pouvoir (qui en est souvent un de blocage) aux forces en place (incumbents) et pas assez aux forces montantes (jeunes, minorités ou pauvres), réduisant ainsi notre capacité d’innovation, de changement, de croissance et de progrès dans son ensemble. Dans nos sociétés urbaines, cela se traduirait par un manque de mobilités sociales, une difficulté croissante à faire de l’entrepreneuriat et dans la capacité à fournir la gamme des bâtiments urbains nécessaires pour un marché dynamique et abordable. Autre facteur : un surplus réglementaire.

La qualité de cet ouvrage est certainement de faire l’argumentation la plus plaisante en ce sens et des plus divertissante à lire.

Note : Pour ceux qui aimeraient entendre une conversation sérieuse et à propos du livre The Rise and Decline of Nations, il y a ce podcast récent d’Ezra Klein au titre qui dit tout : A Critique of Government That Liberals Need to Hear


Pour le dernier livre du mois (31 mars 2022), la chronique portera sur le dernier livre d’un urbaniste bien connu dans la province, M. Gérard Beaubet, Banlieue, dites-vous? Le livre lancera aussi une série qui couvrira le mois d’avril et qui portera justement sur l’histoire de la banlieue en Amérique. 

Tags Survival of the City, Edward Glaeser, David Cutler, COVID-19, Urban Management

Une fois pour toute

March 17, 2022 John Voisine
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Triumph of the City—How Our Greatest Invention Makes Us Richer, Smarter, Greener, Healthier, and Happier. Edward Glaeser, Penguin Books, 2011, 338 pages.

Chacun a sa façon bien particulière d’exprimer son amour. Si on devait s’imaginer une lettre d’amour à la ville et à la notion même d’urbanité de la part d’un économiste, le livre d’Edward Glaeser incarne certainement un idéal qui s’en rapproche. Comme on peut l’anticiper d’un représentant de cette profession, cela se fait avec une armature comptable assez appuyée et inévitablement quelques angles morts. Mais dans ce cas particulier, la comptabilité est le plus souvent mise au service d’une démonstration assez crédible et les angles morts sont plutôt les manifestations de préférences idéologiques assumées et sans malice.

Si le titre pouvait laisser un certain doute, pour qui aimerait y voir une boutade mordante, le sous-titre vient immédiatement dissiper toute ambiguïté. La ville est ici la meilleure invention de l’humanité, engin de richesses, centres de toutes formes de création, d’innovation et catalyseur d’enseignement de pointe. Grâce à leurs diversités, les villes sont des milieux productifs sur les plans économique et humain. Lorsque mariées à la densité, elles sont génératrices de milieux aménagés et naturels sains et durables. Avec la concentration des meilleurs soins préventifs et curatifs, elles sont porteuses de populations en santé et dynamique. Comme si ce n’était pas assez, le taux de bonheur y est élevé, probablement un facteur des nombreuses opportunités.

Même les aspects les moins réjouissants de certaines villes contemporaines, comme les quartiers défavorisés (bidonvilles et autres types de ghettos) sont dépeints, avec justesse, comme autant de zones de croissance potentielle pour la ville elle-même, mais surtout pour les populations qui s’y trouvent. Mais que dire lorsqu’on fait face à des villes entières sur le déclin ou sous l’emprise d’une corruption si massive que sa population est laissée à elle-même? En fait, si certains cas semblent irrémissibles (Detroit?), des effets de cycles sont souvent à la racine d’affaissement temporaire (NYC des années 1970), et il est plus souvent qu’autrement possible de renverser la vapeur. Comment? En investissant dans le capital humain (existant ou par l’immigration), ce qui encourage parfois une renaissance sur des bases nouvelles (innovations, inventions, entrepreneurship, etc.). Si cela ne change rien? L’auteur propose la notion de «Shrinking to Greatness».

Sur les traces de Triumph of the City

On l’aura deviné, cette dernière proposition, qui réserve plus de «shrinking» que de «greatness», est une de ces fausses solutions que seul un économiste peut aimer. Mais ceci n’est pas l’essentiel de l’argument de M. Glaeser, tant s’en faut. Il prend au contraire la peine de démontrer, recherches originales et statistiques à l’appui, que même les zones où règne misère et pauvreté, presque synonyme de certaines agglomérations, sont bien plus des représentations de la force de ces villes en tant que générateur de richesse. En Asie par exemple, l’auteur démontre longuement comment d’autres de ces villes ont réussi à tirer profit de sur leurs réseaux et de leur capital humain, comme Bangalore dans le domaine des technologies ou de façon quasi sui generis, comme dans le cas de Singapore. Le cas de Hong Kong n’est malheureusement plus aussi fertile et limpide qu’au moment de la parution du livre, mais cela n’enlève rien à ce qu’elle était devenue avant les répressions chinoises. Au contraire, la résistance féroce de la société civile à celles-ci est une illustration limpide de la force des villes.

Curieusement, c’est lorsque le regard se porte sur la situation des villes américaines qu’on notera plus de raccourcis. Le fait que les villes côtières soient contraintes sur le plan de l’abordabilité et de la disponibilité du logement est bien connu et documenté, mais montrer du doigt les efforts des défenseurs du patrimoine est peu crédible. Questionner le zonage est légitime, mais il ne faut pas oublier que cette réglementation représente une volonté politique et populaire. Le nimbysme est un fléau, mais que font-ils d’autre que d’utiliser les mécanismes en place? Il est aussi question des bénéfices mythiques de la ville sans zonage et des miracles du laissez-faire caractéristique de la région du Sunbelt. Heureusement, plusieurs autres exemples de succès urbains (européen et américain) sont décrits avec verve, nuance et conviction et ne reposent pas uniquement sur l’attraction du «cheap».

L’auteur donne la meilleure version de son idéologie d’attache (il est Senior Fellow au Manhattan Institute), et même si l’on préférait un meilleur questionnement sur certains points, il est bon de lire un fervent plaidoyer urbain en provenance du côté droit de l’assemblée.


La semaine prochaine, une forme de suite : chronique du livre Survival of the City, qui tient compte de nos réalités urbaines en transformation, et des perceptions changeantes sur la façon d’occuper durablement nos villes.

Tags Triumph of the City, Edward Glaeser, Urban Economy, Urban sociology, Urban Design

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