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Wellington | Fabrique urbaine

3516, rue Gertrude
Verdun, Québec H4G 1R3
514-761-1810
L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Stripmining Montreal

August 7, 2025 John Voisine
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De-Industrializing Montreal—Entangled Histories of Race, Residence, and Class. Steven High, McGill-Queen’s University Press, 2022, 419 pages. Je tiens à remercier M. B. pour l’opportunité d’avoir eu accès à ce livre.

Série Perspectives montréalaise — Les quartiers

Ce n’est pas tous les jours qu’on a la chance et le bonheur de tomber sur un ouvrage aussi stimulant que celui que nous offre ici Steven High, professeur d’histoire à l’université Concordia et un des principaux responsables et initiateur du Centre d’histoire orale et de récits numérisés (CHORN). La facture de l’ouvrage est celle d’un livre d’art qui se dépose sans gêne sur une petite table de salon afin de se laisser dévorer par des convives curieux. Si les photos, les images et les représentations graphiques semblent nous entrainer sur les chemins d’une visite de quartier bohème et digestive, c’était probablement parce qu’on avait échappé ou oublié de prendre au sérieux le sous-titre : Entangled Histories of Race, Residence, and Class. Ainsi, cet ouvrage a beau être en mesure de se placer sans honte juste à côté du plus sophistiqué des beaux-livres, son texte ne nous laisse jamais oublier que nous sommes en train de parcourir un travail académique qui ne trouvera pas d’égales avant longtemps. Non pas que la matière soit rébarbative ou obtuse ; bien au contraire, grâce à un travail rigoureux qui combine la recherche sur le terrain, la collecte méthodique dans les archives d’organismes locaux, la réalisation de nombreuses entrevues auprès de témoins et de participants de toutes conditions, et l’apport académique, fait pour fournir un cadre théorique rendant lisible les grands enjeux de chaque époque étudiée, nous sommes ici devant une œuvre totale, qui est beaucoup plus que la somme de ses éléments.

Tous ces éléments sont d’ailleurs mis au service d’une histoire socio-économique, mais aussi individuelle et populaire des quartiers du grand sud-ouest (Pointe-Saint-Charles, Saint-Henri, Petite-Bourgogne, Griffintown) de Montréal. Avec le canal de Lachine et les industries installés sur ses rives servent de fil conducteur, mais surtout comme vecteur des modifications profondes sur les espaces urbains qu’il traverse, l’auteur nous présente les histoires urbaines, sociales et économiques qui illustre les impacts, dans un premier temps de l’industrialisation sur le tissu urbain et les collectivités, mais surtout, de cette longue période aux expressions plurielles et souvent décalé qu’a été la désindustrialisation. Très naturellement, l’angle choisi pour faire cette narration en illumine la brutalité ordinaire et anonyme et, ce faisant, en écarte toute tentative d’une expression romantique ou de verser dans une nostalgie facile. Ce n’est pas pour dire que celle-ci ne pouvait pas exister, mais plutôt que, comme le démontre l’auteur, il ne manquera jamais de sources qui préfèrent la version aseptisée de l’histoire. Cette version est même souvent implantée (sous forme de panneaux « d’interprétation ») au cœur de ces quartiers.

MAIS LE CANAL DE LACHINE ET SA MÉTAMORPHOSE était juste un de ces vecteurs de l’industrialisation et, plus tard, de la désindustrialisation. On oublie trop souvent le réseau de transport qui l’accompagnait partout : le chemin de fer. À une certaine époque, ce dernier occupait beaucoup plus d’espace dans les tissus urbains qu’à présent, allant jusqu’au cœur des îlots et se déplaçant parfois jusque dans les rues. Le train représentait de nombreuses possibilités d’emploi, comme dans les ateliers du Canadien National de Pointe-Saint-Charles. Mais un des angles moins moins connu, et aussi un des points forts de l’ouvrage, est de restituer la longue histoire du rail dans le quartier que nous connaissons maintenant sous le nom de Petite-Bourgogne. Synonyme de ce que Montréal avait de quartier à la population majoritairement noir et anglophone, le secteur urbain entre la rue Notre-Dame au sud, Saint-Antoine au nord et la rue Guy à l’est et l’avenue Atwater à l’ouest s’était constitué afin de répondre à la demande en travailleurs pour les wagons des trains de passagers. En effet, durant une période d’environ 50-60 ans, le train constituait l’essentiel des moyens de déplacement longue distance au pays. En même temps, et durant la période parallèle de prospérité dans les usines et les divers ateliers mécaniques des secteurs adjacents, les emplois en usine étaient fermés à cette population noire. Un aspect qui fait l’objet d’une attention très éclairante dans l’ouvrage. Sur le plan urbain, le secteur est connu pour avoir été éventré par l’autoroute Ville-Marie, qui vint mettre un terme à la vie nocturne dans les clubs qui se trouvaient pour l’essentiel sur le flanc nord de la rue Saint-Antoine. Toute personne qui, de nos jours, marche le long de cet axe, entre la rue Guy et l’avenue Atwater, peut facilement constater la déchéance engendrée par le passage de l’autoroute. Le quartier fut aussi utilisé comme un des lieux initiaux d’expérimentation (avec les Habitations Jeanne-Mance et la tour de Radio-Canada) du urban renewal à Montréal (on se rappelle : urban renewal means negro removal; ce fut véritablement le cas dans ce quartier). Le chapitre sur Petite-Bourgogne (The Black City Below the Hill) et qui aborde toutes ces questions vaut à lui seul le détour.

Il y a quelques mois nous avons partagé notre lecture de l’ouvrage The Invention of Brownstone Brooklyn. D’une certaine manière, il serait profitable de lire ces deux ouvrages en parallèle. En effet, celui de monsieur Steven High vient ici en quelque sorte confirmer l’application en contexte montréalais de plusieurs des modalités de transformation et de gentrification exposées à l’épicentre du phénomène. Mais nul besoin de partager toutes les conclusions de l’auteur pour apprécier la façon unique et originale de rendre compte des particularités qui ont marqué l’évolution de ces quartiers du Sud-ouest de Montréal.

Tags Steven High, Deindustrializing Montreal, Histoire populaire et urbaine, Sud-Ouest, Série perspectives montréalaise

De cols mousseux à coeurs malades

June 10, 2025 John Voisine
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Les Coeurs tigrés. Yves Morin, Hamac classique (Septentrion), 2011, 446 pages. Copie empruntée à la bibliothèque d’arrondissement.

Série Fiction

Je dois admettre être un peu nerveux et appréhensif avant de m’engager dans un roman « historique ». Plus la gimmick qui structure le récit est élaborée, plus mon aversion envers la moindre facilité narrative ou faux-fuyant de la part de l’auteur me fait immédiatement arrêter la charade. Ici, nous avons deux histoires imbriquées et juxtaposées, comme dans une trame miroir : elles se déroulent dans la même ville (Québec), dans le même hôpital (l’Hôtel-Dieu de Québec), administré par le même ordre de religieuses (les Augustines) et qui implique la même crise médicale autour du même produit (la bière). Avec au centre de l’intrigue la même cause et le tout, à 300 ans d’intervalle (1665 et 1965). De plus, que penser du fait que l’auteur, Yves Morin, soit aussi un ancien cardiologue au même hôpital et un ancien doyen de la faculté de médecine de l’Université Laval? Sans préjudice, mais personne ne viendra nous reprocher de craindre que ce ne soit pas là le profil qui conduit à de la production littéraire. Cela ne s’invente pas, mais l’auteur est aussi le « héros » de son histoire romancée, puisque c’est lui-même (et son équipe) qui, au milieu des années 1960, a fait la description canonique de cette maladie cardiaque, a fini par en trouver la cause et a mis en place le protocole de traitement. C’est surtout le genre de maladie qui se combat en assurant la suppression de la cause. Même après avoir compris le comportement cyclique des cas observés à Québec, on n’avait qu’une partie très fragmentaire de la réponse. Les vecteurs d’introduction de la maladie divergeaient au point d’en faire, il y a trois cents ans, une simple occurrence naturelle et, lors de sa résurgence en 1965, la résultante d’un geste proche de l’acte criminel, motivé par la cupidité.

Assez exceptionnellement, j’étais malgré tout favorablement disposé à m’engager dans ce roman, puisqu’il nous avait été recommandé par un conférencier spécialisé sur l’histoire et la production de la bière dans la province. Il avait évoqué la fin de la fameuse brasserie Boswell-Dow, qui, après presque 180 ans, a périclité de manière assez dramatique. Tout le monde connait, vaguement, sans vraiment connaitre, les causes de cet effondrement. Nous laissant un peu sur notre faim, le conférencier nous avait toutefois promis que ce roman, écrit par le cardiologue aux premières loges des évènements du récit, saurait combler notre curiosité tout en offrant de bons moments de lecture. Ma seule frustration maintenant est de ne pas l’avoir commencé le soir même de la conférence! [1]

IL NE FAUT PAS DANSER AUTOUR DES MOTS ICI. Il s’agit bien de comportements criminels ayant entrainé la mort d’une vingtaine d’hommes, pour la plupart des débardeurs ou des gens de métier du port de Québec, gros consommateur de bière (jusqu’à six litres par jour), mais sinon innocent dans cette affaire. Ce comportement s’est incarné dans plusieurs petits « gestionnaires de profit » d’une brasserie qui cherchait à s’accrocher à ses marges dans un contexte social et concurrentiel en pleine évolution. Que dire des organismes gouvernementaux, autant provinciaux que fédéraux, chargés de protéger le public ? Une autre histoire, subtilement présentée dans ce roman, où la convergence des intérêts n’a pas joué en faveur du citoyen.

Mais le lecteur attentif se demandera maintenant : comment ce qui ressemble à un adjuvant moderne a-t-il pu trouver sa pareille dans un environnement « ancien régime », du temps des héroïques sœurs augustines et de l’intendant Talon, avec sa fameuse bière pour guérir les colons des maux de l’eau-de-vie? Rendu à ce stade, il vous faudra me faire confiance lorsque j’affirme que l’auteur a simplement eu la plume heureuse, qui fait de ce roman à la fois un thriller historique, un thriller médical, un thriller scientifique et, comme pour toutes les meilleures œuvres littéraires, bien plus que la somme des genres qui le compose. Toutes les réponses se dévoilent au moment opportun dans ce récit rythmé par des personnages bien de leur temps. Chacun d”eux, à sa manière, en appliquant « l’intelligence de son époque », arrive à aider ses semblables, autant sur le plan médical que sur le plan humain. L’auteur réussit parfaitement son pari de faire se côtoyer deux réalités historiques parallèles, mais en communication, sans la moindre condescendance envers nos semblable d’une époque maintenant révolue [2]. Nos réalités font que les coupables ne seront jamais châtiés, mais la recherche sincère et authentique de la vérité en son temps est sa propre rédemption.


[1] J’ai l’impression de donner ici plus que le client en demande, mais, pour ceux qui voudrait en découvrir encore plus, il y a l’exposition permanente à l’îlot des Palais (le site même de l’ancienne brasserie Dow), à Québec, qui s’intitule Ici, on brassait la bière ! et qui porte justement sur cette histoire. De plus, on peut y entendre le témoignage du docteur Yves Morin. Pour ceux qui aimeraient aller encore plus loin, pourquoi pas une visite au monastère des augustines de l’Hôtel-Dieu ! On pourra même y admirer la toile dont il est question dans le roman (oui, elle est vraie !) L’exposition permanente offre de nombreux témoignages des sœurs elles-mêmes. Pour en tirer le meilleur, je recommande la visite guidée.

[2] La mort emporte tout. Le site Web sur lequel le docteur Yves Morin avait mis en ligne la documentation qu’il s’était constituée afin d’écrire son roman devait encore être accessible jusqu’à son décès, en juin 2024. Un échange de courriel avec l’éditeur sur cette question s’est avéré sans issue. Mais grâce à la magie du WayBack Machine, on peut récupérer l’essentiel du matériel. On cherche pour lescoeurstigres.ca.

Tags Les coeurs tigrés, Yves Morin, Québec, Histoire populaire et urbaine, Série fiction, Histoire du Québec, Brasserie Dow

Au bout de la pente douce

November 9, 2020 John Voisine
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Vivre en quartier populaire - Saint-Sauveur 1930-1980. Dale Gilbert, Les éditions du Septentrion, 2015, 334 p.

Il y a plus d’une décennie maintenant, lorsque j’ai vécu à Québec pour les études et le travail, j’avais des attentes par rapport à la ville et ses gens. Sur plusieurs aspects, elle ont été dépassées et comblées. J’ai eu la chance de passer mes années là-bas au cœur historique de Québec, à l’intérieur des murs, à deux pas de chez Paillard et de la librairie Pantoute, pour ceux et celles qui peuvent s’imaginer. Mais la grande agglomération de la Ville de Québec est loin de se limiter à cette partie haute de la ville; elle est plus que son arrondissement historique, et souvent, tellement moins aussi. 

Il y a heureusement les quartiers anciens en ligne avec la haute-ville (St-Jean-Baptiste, Montcalm, Saint-Sacrement et même Sainte-Foy, à la limite), lorsque la ville se construisait encore selon une logique qui n’incluait pas l’auto-solo dans l’équation et la basse-ville, accessible par quelques marches d’escalier ou la descente d’une pente plus ou moins douce, pour s’absorber dans un monde urbain et culturel différent. C’est ainsi que j’ai découvert petit à petit, durant mon séjour, le quartier qui a fini par symboliser le meilleur de la syncrétique urbaine de Québec : Saint-Sauveur.

Il n’y a rien de surprenant alors si j’avoue avoir acheté dès sa parution l’ouvrage de Dale Gilbert; mais c’est finalement seulement cet été que j’ai réussi à le lire. On pourrait croire qu’une histoire basée sur des entrevues faites avec des gens nés ou ayant vécu de longues périodes dans un quartier n’est en rien liée à l’urbanisme. C’est en lisant un ouvrage écrit avec la richesse des perspectives humaines, sociales et historiques comme celui de M. Gilbert qu’on redécouvre l’essentiel d’un quartier urbain : les gens qui l’habite.       

Il n’y a rien comme entendre le parlé de gens qui ont habité un quartier sur la longue durée pour s’imprégner de ce que devait être cette expérience. On comprend alors comment la logique particulière du cadre bâti urbain de Saint-Sauveur fonctionnait à l’apogée de son potentiel. M. Gilbert offre dans son ouvrage la chance de se sentir un peu, le temps de lire ses chapitres évocateurs, vivre en quartier populaire.

Sur les traces de Vivre en quartier populaire

Il n’y a rien comme une bonne bibliographie pour aller plus loin dans une œuvre, marcher un peu dans les sentiers empruntés par l’auteur-e et poursuivre l’exploration des idées soulevées par l’ouvrage. Une bibliographie informative et montée avec soin est le signe d’un.e auteur.e qui se respecte et respecte ses lecteurs.trices. 

Dans cet esprit, pour chaque ouvrage revu, je compte prendre quelques lignes pour souligner et mettre en évidence les éléments piquant ma curiosité, en vue d’une étude plus poussée. Alors pour commencer, dans l’ouvrage de Dale Gilbert, voici les éléments marquant : 

Dans la catégorie « si seulement je pouvais me mettre la main sur ce livre pour enfin le lire » : La banlieue revisitée.

Dans la catégorie « ouvrages maintenant sur ma liste de lecture et découverts grâce à ce livre » : Creeping Conformity. How Canada Became Suburban, 1900–1960 et Republic of Drivers. A Cultural History of Automobiliste in America.

Dans la catégorie « je ne m’attendais pas à voir celui-là ici » : L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident.

Dans la catégorie « ces ouvrages vont bientôt faire l’objet d’une chronique dans cet espace » : Fighting Traffic: The Dawn of the Motor Age in the American City et City. Urbanism and its End.

Dans la catégorie « ce n’est pas tout les jours qu’on trouve un ouvrage dont l’auteur porte le même nom de famille que nous » : Histoire du catholicisme québécois. Le XXe siècle. Tome 2 : De 1940 à nos jours. Nive Voisine (dir), Boréal Express, 1984. Je me rappel que ma mère m’avait parlé de cet auteur, il y a longtemps. L’ouvrage ne semble plus disponible.

Il y a certaines personnalités littéraire qui jouisse d’une belle renommée de leur vivant, mais qui, par la suite, probablement par manque d’une « école » attachée à leur survie, finissent par s’éclipser. Cela semble être le sort réservé à Roger Lemelin et son œuvre. Évidemment, M. Gilbert fait mention de son roman, Au pied de la pente douce (1944), mais essayer de trouver l’ouvrage maintenant en librairie est plutôt une aventure (en fait, impossible, même en commande spéciale). Pourtant, ce roman est dans la même catégorie que Bonheur d’occasion (1945 — l’histoire se déroule dans le quartier Saint-Henri, l’équivalent montréalais de Saint-Sauveur), qui se trouve en vente dans toute bonne librairie. La bibliothèque centrale de la Ville de Québec (dans le quartier voisin de Saint-Sauveur, Saint-Roch) est nommée en l’honneur son auteur, Gabrielle Roy. 

Tags Vivre en quartier populaire, Dale Gilbert, Ville de Québec, Quartier Saint-Sauveur, Histoire populaire et urbaine

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