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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Il était une fois des gens heureux

April 10, 2025 John Voisine
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Les Plouffe [1]. Roger Lemelin, Édition Stanké, 2008 [1948], 448 pages.

« Il était une fois des gens heureux… » est la chanson-titre de la bande originale du film (BOF), chantée par Nicole Croisille. Paroles et musique de Stéphane Venne. Mais c’est l’interprétation de Nicole Martin qui demeure canonique.

On ne pourra faire autrement, surtout si la lecture de ce roman se fait après le premier de Roger Lemelin, Au pied de la Pente douce, qui se déroule dans le même quartier de Québec et le même univers familial et temporel, que de comparer entre les deux. Et certainement, cette comparaison emmènera un soupir de soulagement, même si la lecture ne se fait pas sans ressentir de nombreuses crispations devant plusieurs scènes et échanges entre les personnages. Le patriarche des Plouffe, Théophile, ainsi que le curé de la paroisse, Folbèche, sont dépeints dans toutes leurs rigidités aveugle et avilissante. Il y a par contre des scènes du roman qui ont atteint un statut quasi mythique, comme celle au Château Frontenac, entre Ovide Plouffe (interprété dans les films par Gabriel Arcand, au meilleur de sa force réservée d’acteur) et Rita Toulouse (interprétée dans les films par Anne Létourneau, incarnation sans pareil du charme d’une autre époque). Ou encore celle de la procession contre la conscription, qui s’étend et serpente entre les quartiers de la basse-ville et les hauteurs de la basilique-cathédrale et qui signalera le point d’orgue de ce mouvement. Mais, bien entendu, si nous avons l’impression de reconnaitre ces scènes emblématiques avant même de les lire, c’est parce que nous avons souvenir, pour plusieurs, d’avoir littéralement vu ces scènes dans le film [1] réalisé par Gilles Carle, qui l’avait d’ailleurs scénarisé en proche collaboration avec l’auteur.

L’une des particularités de l’œuvre Les Plouffe, et même ce qui fut marquant à son époque, était sa capacité à s’intégrer et à prendre la forme du média ayant le plus d’impact lors de la translation. Ces personnages, à saveur prononcée de « quartier populaire urbain », avec leurs caractéristiques si distinctement « ouvrières », apportent une fraîcheur dans l’univers renfermé et frileux de la littérature canadienne-française de 1948, au moment de paraitre. Passant de personnages de roman (un peu rigides) à l’incarnation d’une certaine classe, enfin visible à la faveur de leurs infiltrations dans le monde de la radio et immédiatement après, en inventant presque le genre, en téléroman à la télévision de Radio-Canada (autant les émissions de radio que de télé s’intitulaient La famille Plouffe). Et lorsque tous ces rôles et situations avaient été pressés pour tout ce qu’ils avaient à donner et commençaient même à reculer dans les mémoires, la Révolution tranquille et autres changements temporels et contextuels aidants, Les Plouffe connurent un dernier hourra, grâce au film sorti en 1981. Trois ans plus tard, en 1984, une suite, Le crime d’Ovide Plouffe, basé cette fois sur un scénario original de Roger Lemelin (et non un livre), qu’il calque sur un fait réel survenu en 1949, permet de conclure l’histoire, dans toute sa finalité tragique.

Il n’est plus possible de replonger dans cet univers avec les yeux frais et imprégné de la culture d’un lecteur de l’époque. Malgré tout, Les Plouffe est certainement parmi les œuvres qui se rapprochent le plus de l’expérience d’origine, sans que la barrière temporelle soit infranchissable, au point de rendre la lecture comme celle d’une expérience pénible en pays étranger. En réalité, on y gagne positivement en faisant la connaissance des Plouffe, sous toutes leurs incarnations!



[1] On trouve aussi gratuitement, sur le site de Radio-Canada, cette même édition du roman lu par l’acteur Pierre Curzi, qui à l’époque dans le film interpréta le personnage de Napoléon, un des trois frères (celui du milieu) de la famille Plouffe. C’est une bonne façon de découvrir l’œuvre, autrement et à peu de frais! Bonne écoute!

[2] Pour la petite histoire, plusieurs scènes du film qui, dans l’univers de l’histoire, se déroule dans les rues du quartier Saint-Sauveur, en basse-ville de Québec, ont été filmées dans le quartier Pointe-Saint-Charles (traditionnellement anglophone irlandais) de Montréal. C’est assez évident et ironique lorsqu’on connait les deux quartiers, comme l’illustre ce montage.

Tags Les Plouffe, Roger Lemelin, Série fiction, Quebec City, Quartier Saint-Sauveur

Les raideurs de la Pente

January 14, 2025 John Voisine
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Au pied de la Pente douce. Roger Lemelin, Stanké, collection 10/10, 2009 (Édition de l’Arbre, 1944), 388 pages.

Série fiction — À tous les deux mois

J’eus beaucoup de difficulté à lire et finir Au pied de la Pente douce cet automne. C’était le premier roman de Roger Lemelin. Lorsque l’on parle encore de lui, c’est généralement pour sa série Les Plouffe (qui se déroule dans le même univers). On le mentionne aussi pour avoir été président et éditeur du quotidien La Presse durant les années 1970, jusqu’en 1981. En d’autres termes, ce fut un homme à la carrière autant politique que littéraire, même si celle-ci était autrement plus du côté de la représentation politique que littéraire. C’était aussi à une époque où ce genre de mélange était possible et même relativement courant.

Si je compare maintenant la Pente douce à un roman paru presque simultanément et à l’impact analogue, Bonheur d’occasion de Gabrielle Roy, le contraste peut être choquant. Ce dernier, par exemple, trouve encore sa place dans tous les syllabus de programme de littérature, du secondaire au cégep et à l’université. Il est facile de se le procurer dans toutes les bonnes librairies, en volume de poche, en édition cadeau ou, sans jeu de mots, en livre d’occasion. Après l’expérience de lecture comparativement pénible que je viens de vivre avec la Pente douce, cet état de fait ne surprend plus.

Je suis pourtant ce ceux qui aurait aimé affirmer que ce premier roman de Lemelin est un classique injustement oublié de la littérature urbaine canadienne-française. À côté de Bonheur d’occasion, il est toutefois vrai que la Pente douce est le premier de ce genre qui fait, dans le roman, une translation de la fameuse « misère » canadienne-française en milieu urbain. Mais, là où mes souvenirs du roman de Gabrielle Roy sont ceux d’une lecture viscérale, qui vient nous chercher là où la douleur se cache, la Pente douce laisse perplexe devant des situations et des dialogues rendus dans une langue et imprégnés d’une culture qui ne s’assimile que péniblement. Étant donné la profusion de noms, prénoms et surnoms utilisés par l’auteur, il est souvent difficile de savoir de qui ou de quoi il est question entre les personnages. À leur décharge, ceux-ci ont toutefois un vrai dialogue intérieur, mais ce qui les fait « tiqué » nous est si étranger qu’il est parfois ardu de suivre la logique du déroulement du récit. Et si l’on ajoute à cela la difficulté de comprendre les enjeux des situations décrites, il est naturel que l’abandon de la lecture, avant la deuxième partie, qui est pourtant plus engageante, devienne la solution la plus courante.

En dernier lieu, j’aimerais toutefois faire un appel à la persistance à travers les pages touffues de ce roman, en quelque sorte un pionnier du genre. Le choc du changement et de l’évolution ne peut être absorbé et compris qu’en faisant preuve d’indulgence (la seule manière de comprendre profondément). Il faut se placer en position de vulnérabilité, en lecteur ouvert à ce qui devait, il n’y a pas si longtemps, être un univers assez commun pour enfin mériter sa propre trame. Le fait que l’écart entre cet univers et le nôtre soit un véritable canyon plutôt qu’une « pente douce » ne devrait toutefois pas surprendre. Je n’ai aucun doute que Roger Lemelin, dans ce premier roman écrit à 23 ans, ait évoqué fidèlement une tranche de vie des gens du quartier Saint-Sauveur, en basse-ville de Québec, juste avant le deuxième conflit mondial. C’est à nous maintenant de nous équiper pour cette randonnée, si l’on veut bien s’y plaire.

Tags Au pied de la Pente douce, Roger Lemelin, Série fiction, Québec, Quartier Saint-Sauveur

Au bout de la pente douce

November 9, 2020 John Voisine
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Vivre en quartier populaire - Saint-Sauveur 1930-1980. Dale Gilbert, Les éditions du Septentrion, 2015, 334 p.

Il y a plus d’une décennie maintenant, lorsque j’ai vécu à Québec pour les études et le travail, j’avais des attentes par rapport à la ville et ses gens. Sur plusieurs aspects, elle ont été dépassées et comblées. J’ai eu la chance de passer mes années là-bas au cœur historique de Québec, à l’intérieur des murs, à deux pas de chez Paillard et de la librairie Pantoute, pour ceux et celles qui peuvent s’imaginer. Mais la grande agglomération de la Ville de Québec est loin de se limiter à cette partie haute de la ville; elle est plus que son arrondissement historique, et souvent, tellement moins aussi. 

Il y a heureusement les quartiers anciens en ligne avec la haute-ville (St-Jean-Baptiste, Montcalm, Saint-Sacrement et même Sainte-Foy, à la limite), lorsque la ville se construisait encore selon une logique qui n’incluait pas l’auto-solo dans l’équation et la basse-ville, accessible par quelques marches d’escalier ou la descente d’une pente plus ou moins douce, pour s’absorber dans un monde urbain et culturel différent. C’est ainsi que j’ai découvert petit à petit, durant mon séjour, le quartier qui a fini par symboliser le meilleur de la syncrétique urbaine de Québec : Saint-Sauveur.

Il n’y a rien de surprenant alors si j’avoue avoir acheté dès sa parution l’ouvrage de Dale Gilbert; mais c’est finalement seulement cet été que j’ai réussi à le lire. On pourrait croire qu’une histoire basée sur des entrevues faites avec des gens nés ou ayant vécu de longues périodes dans un quartier n’est en rien liée à l’urbanisme. C’est en lisant un ouvrage écrit avec la richesse des perspectives humaines, sociales et historiques comme celui de M. Gilbert qu’on redécouvre l’essentiel d’un quartier urbain : les gens qui l’habite.       

Il n’y a rien comme entendre le parlé de gens qui ont habité un quartier sur la longue durée pour s’imprégner de ce que devait être cette expérience. On comprend alors comment la logique particulière du cadre bâti urbain de Saint-Sauveur fonctionnait à l’apogée de son potentiel. M. Gilbert offre dans son ouvrage la chance de se sentir un peu, le temps de lire ses chapitres évocateurs, vivre en quartier populaire.

Sur les traces de Vivre en quartier populaire

Il n’y a rien comme une bonne bibliographie pour aller plus loin dans une œuvre, marcher un peu dans les sentiers empruntés par l’auteur-e et poursuivre l’exploration des idées soulevées par l’ouvrage. Une bibliographie informative et montée avec soin est le signe d’un.e auteur.e qui se respecte et respecte ses lecteurs.trices. 

Dans cet esprit, pour chaque ouvrage revu, je compte prendre quelques lignes pour souligner et mettre en évidence les éléments piquant ma curiosité, en vue d’une étude plus poussée. Alors pour commencer, dans l’ouvrage de Dale Gilbert, voici les éléments marquant : 

Dans la catégorie « si seulement je pouvais me mettre la main sur ce livre pour enfin le lire » : La banlieue revisitée.

Dans la catégorie « ouvrages maintenant sur ma liste de lecture et découverts grâce à ce livre » : Creeping Conformity. How Canada Became Suburban, 1900–1960 et Republic of Drivers. A Cultural History of Automobiliste in America.

Dans la catégorie « je ne m’attendais pas à voir celui-là ici » : L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident.

Dans la catégorie « ces ouvrages vont bientôt faire l’objet d’une chronique dans cet espace » : Fighting Traffic: The Dawn of the Motor Age in the American City et City. Urbanism and its End.

Dans la catégorie « ce n’est pas tout les jours qu’on trouve un ouvrage dont l’auteur porte le même nom de famille que nous » : Histoire du catholicisme québécois. Le XXe siècle. Tome 2 : De 1940 à nos jours. Nive Voisine (dir), Boréal Express, 1984. Je me rappel que ma mère m’avait parlé de cet auteur, il y a longtemps. L’ouvrage ne semble plus disponible.

Il y a certaines personnalités littéraire qui jouisse d’une belle renommée de leur vivant, mais qui, par la suite, probablement par manque d’une « école » attachée à leur survie, finissent par s’éclipser. Cela semble être le sort réservé à Roger Lemelin et son œuvre. Évidemment, M. Gilbert fait mention de son roman, Au pied de la pente douce (1944), mais essayer de trouver l’ouvrage maintenant en librairie est plutôt une aventure (en fait, impossible, même en commande spéciale). Pourtant, ce roman est dans la même catégorie que Bonheur d’occasion (1945 — l’histoire se déroule dans le quartier Saint-Henri, l’équivalent montréalais de Saint-Sauveur), qui se trouve en vente dans toute bonne librairie. La bibliothèque centrale de la Ville de Québec (dans le quartier voisin de Saint-Sauveur, Saint-Roch) est nommée en l’honneur son auteur, Gabrielle Roy. 

Tags Vivre en quartier populaire, Dale Gilbert, Ville de Québec, Quartier Saint-Sauveur, Histoire populaire et urbaine

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