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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Une histoire de la transformation urbaine par l'embourgeoisement

January 23, 2025 John Voisine
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The Invention of Brownstone Brooklyn—Gentrification and the Search for Authenticity in Postwar New York. Suleiman Osman, Oxford University Press, 2011, 348 pages. [Livre numérique lu sur plateforme Kindle]

Je vais commencer par un simple mea-culpa : avant la lecture de cet ouvrage de monsieur Suleiman Osman, je conservais toujours une dose de scepticisme à propos de la notion même de gentrification. Pas que cela ne pouvait exister, mais qu’il était réducteur de confiner les changements associés à ce terme comme étant ceux des paramètres négatifs contenus dans ce mot. Il est possible de « transformer » ou de « redécouvrir » un quartier ou un secteur urbain, sans que cela ne conduise nécessairement à la gentrification du lieu. Mais, comme le démontre clairement l’auteur (essentiellement avec la prépondérance de sa recherche appliquée aux aspects urbains, architecturaux, mais surtout culturels, historiques et politiques), les notions de transformation, de découverte ou pires encore, de redécouverte sont en quelque sorte des qualificatifs générés par une série de gestes qui se soldent presque invariablement en de la gentrification. Cela dit, je demeure convaincu qu’il est possible de revitaliser sans gentrifier. Il faut toutefois admettre que cela demande sans doute une coordination des intervenants difficile à institutionnaliser et à faire couramment. D’autant plus que l’un des effets du mouvement de renouveau urbain moderniste (urban renewal) est une forme de paralysie dans notre volonté et capacité à planifier à l’échelle métropolitaine. Il en résulte un mode réactif, un braquage localisé contre tout ce qui sert la ville, au-delà de l’environnement d’un quartier.

En fait, après cette lecture, il semble que, si l’on est pour éviter la gentrification, deux voies offrent du potentiel; mais seule la deuxième a fait ses preuves. La première est une transformation très lente, loin des regards et des discours sur l’urbanisme à échelle humaine, sur la « redécouverte » d’un quartier ou, plus généralement, du « ballet urbain » à la Jane Jacobs. Bien souvent, dès qu’on commence à parler en ces termes d’un espace urbain, il est déjà perdu à la spéculation (à moins d’une intervention puissante de l’état, ce qui, ironiquement, va à l’encontre de l’esprit libertarien à la Jane Jacobs). La deuxième option consiste à combiner un aménagement urbain résidentiel de grande échelle avec une trame viaire serrée, mais flexible, avec une bonne mixité d’usages et d’activités. Pour revenir un peu sur ce que nous avons déjà vu, on envisagerait dans ce cas des complexes coopératifs à la United Housing Foundation (UHF), afin surtout d’assurer la pérennité dans l’accessibilité et l’abordabilité des logements.

Sur les traces de The Invention of Brownstone Brooklyn…

Dans le deuxième chapitre, l’auteur illustre son propos avec une juxtaposition assez sensationnelle. Il prend l’exemple de Concord Village, un complexe à appartements modernistes construit dans les années 1960 selon les règles du urban renewal et qui offre encore aujourd’hui des pied-à-terre en location abordable. l’auteur contraste avec l’entourage des quartiers de « brownstones » rénovés et gentrifiés, où les rares logements qui se rendent disponible ne le sont que pour plusieurs millions de dollars.

La proposition première d’une transformation lente et « naturel » est difficile, puisque, comme le montre cet ouvrage, c’est à l’avantage de ces changements de chercher à se faire connaitre et de réussir ces transformations grâce à la force du nombre. Cela permet la création de nouveaux organes représentatifs qui finissent par prendre le relais de ce qui existait et ainsi changer jusque la culture du lieu, autant dans le domaine commercial, des affaires et sur le plan culturel et politique.

Ce déplacement de population, qui s’accompagne d’une transition de classe (d’ouvrière et clérical à professionnel, gestionnaires de tout genre, artistes, étudiants, universitaires et scientifiques), engendre aussi une translation culturelle. Dans certains cas, cela se manifeste par la constitution d’une nouvelle entité urbaine, « découverte » par ces « pionniers » de la revitalisation. C’est ce lent processus qui a conduit à l’invention de nouveaux « anciens » quartiers, que l’on rencontre maintenant partout dans les villes avec le moindre passé industriel.

Bien entendu, un quartier urbain avec une identité est bien plus que la somme de son inventaire immobilier. Mais sans un mélange démographique et socio-économique diversifié, l’espace urbain se détériore. Pour les zones urbaines « redécouverte », comme Brooklyn, c’est à la fois une chance et une malédiction de s’être trouvé au centre de ces luttes contre le urban renewal. Force de constater que ces luttes ne furent pas conduites par (et encore moins pour) la population locale, mais presque à ses dépens, par une nouvelle classe fuyant l’inauthentique et la manhattanization. Plus près de nous, il n’est pas étonnant de voir des arrondissements comme Hochelaga-Maisonneuve, Ahuntsic-Cartierville ou Verdun (pour ne parler que d’eux), où il existe déjà une riche typologie d’immeubles, être la proie d’un fort phénomène de gentrification. Ces quartiers et leurs cadres bâtis existants se trouvent déjà bien installés au milieu d’un réseau viaire qui articule de manière idéale un environnement urbain qui ne demande qu’à être activé et réalimenté au goût de l’urbanité contemporaine. Ce livre nous permet de mieux comprendre et de reconnaître le phénomène dans toute sa complexité, avec en exemple type l’invention de Brownstone Brooklyn comme épicentre des quartiers de la nouvelle authenticité urbaine.

Tags The Invention of Brownstone Brooklyn, Suleiman Osman, New York City, Gentrification, Urban policy, Coop Housing, United Housing Foundation (UHF)

Still Not Getting It

June 1, 2022 John Voisine
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Still Renovating—A History of Canadian Social Housing Policy. Greg Suttor, McGill-Queen’s University Press, 2016, 316 pages

Deuxième (2) de la série Habitation et logement

Il est à la fois salutaire et assez incroyable qu’un livre sur l’histoire des politiques, des programmes et des réalisations en logement social au Canada existe. Bien simplement, le Canada est passé proche de manquer le bateau, puisque comme le souligne l’auteur, ce n’est que de manière assez tardive, et un peu sur le tard, que le gouvernement fédéral a finalement mobilisé ses ressources pour le financement et la production significative de logements sociaux. En comparaison de ses pays pairs, le Canada a pour de nombreuses années après la Deuxième Guerre, démontré un retard assez marqué, qui n’a commencé à se combler qu’au milieu des années 1960. Avant ce moment, les rares programmes se concentrent sur les vétérans et pour le reste, vive le marché! (Appuyé par la Central Mortgage and Housing Corporation—CMHC.)

Mais après la description de ce départ moins que canon, l’auteur nous fait l’histoire de ce qui fut les trente glorieuses du logement social au Canada. Comme pour confirmer ce retard qui caractérise le système canadien, on doit préciser qu’on parle de la période qui va de l’adoption des amendements à la National Housing Act, en 1964 par le gouvernement minoritaire Pearson et prend fin avec la décision de décentralisation et de désinvestissement (devolution and retrenchment) du gouvernement Chrétien, en 1995-96. En termes d’implantation et de réalisation, cette période de 30 ans est superbement canadian, avec ses accommodements et ses incarnations multiples, qui se collaient si étroitement aux mouvances particulières à chaque province. L’Ontario domine (par le volume et une gestion provinciale, avec l’OHC) et le Québec ne veut pas être en reste (création de la SHQ), sans toutefois mobiliser des ressources équivalentes.

Dans cet ouvrage, le lecteur n’a pas à se contenter d’une reddition de recherche basée sur un épluchage d’archives, mais bénéficie plutôt de l’organisation originale et de la présentation claire d’une histoire nécessairement complexe, par un auteur qui a manifestement une connaissance profonde, matérielle et pratique du domaine. Cette histoire est ainsi présentée de façon à s’intégrer dans la trame des mouvements politiques propre au Canada, qui a façonné de manière si particulière la production du logement social au pays.

Sur les trace de Still Renovating

Les dix premières années des trente glorieuses du logement social au Canada est caractérisé par une production de type «grands ensembles» avec une assez forte concentration de gens dans le besoin sur un même site. Mais très vite, dès le début des années 1970, la politique fédérale fait un virage qui privilégie les organismes à but non lucratif et les groupes coopératifs de tout genre (autour d’une cause sociale, d’un groupe d’intérêt ou ethnique, d’une organisation syndicale, etc.) L’enthousiasme pour cette sorte de structure dans la fourniture du logement social, qui devient alors, dans le meilleur des cas, un logement de type mixte, entraîne toutefois une diminution notable dans la clientèle défavorisée en mesure de bénéficier de cette aide. On s’éloigne d’une politique de logement comme d’un droit; c’est plutôt un logement pour qui a les bons contacts au bon moment auprès des organismes fournisseurs. Si l’on exclut de ce calcul la clientèle avec besoins spéciaux (aînés, autochtones, anciens combattants, etc.), l’on se retrouve avec une capacité de production encore plus insignifiante par rapport aux besoins et à la demande. Les crises récurrentes du logement qui caractérisent ce premier quart de 21e siècle en sont la preuve.

Si nous sommes pour reprendre en main cette situation, actualiser une production et une rénovation de logements dignes de la pluralité des besoins, correspondant aux normes contemporaines de développements durables, certaines pistes sont à favoriser. Il faut reprendre la production sans recréer les ghettos de pauvretés qui sont devenues synonymes des logements sociaux passés. Pour s’assurer d’obtenir une mixité des clientèles (âge, revenu, avec/sans emploi) et des besoins desservis (catégories de ménages, statut légal, handicap physique ou mental), il est primordial de rendre ce logement social à la fois indiscernable et hautement désirable, même recherché comme mode d’habitation urbain. Surtout, cela évitera à long terme la spirale identitaire qui vient dévaluer et stigmatiser ce type de logement comme indésirable et accessoire, lorsqu’il est dans les faits essentiel pour un marché efficace.

Il est temps qu’une entité publique, à l’échelle métropolitaine, se dote de cette mission et commence sérieusement la production de logements sociaux mixtes.


Lundi prochain (6 juin), on poursuit la série Habitation et logement avec 6000 Years of Housing

(2022-06-09) Léger contretemps dans la poursuite de la série qui devrait se résorber la semaine prochaine !

Tags Still Renovating, Greg Suttor, Urban policy, Urban history, Housing policy

Canadian Urban Dreams

September 20, 2021 John Voisine
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Urban Nation—Why we need to give power back to the cities to make Canada strong. Alan Broadbent, Harper Collins Canada, 2008, 244 pages.

Le plus souvent, de nos jours, lorsqu’on entend dire que nous sommes une « urban nation », on n’aura pas tendance à s’imaginer que nos villes sont des cités-États ; comme autant de mini Singapour ou de petites principautés à la Monaco ou Saint-Martin. Il semble plus évident de comprendre que nos villes forment l’essentiel des concentrations de population et d’immigration, nos centres créatifs, artistiques et intellectuels. Elles sont fondamentalement les engins modernes de la vitalité culturelle et économique du pays. Dans le cas de la vaste majorité des cités canadiennes et de l’Amérique, c’est le cas depuis même bien avant la Deuxième Guerre.

Certainement, il faut constater que dans notre contexte constitutionnel canadien, cette puissance des villes ne se traduit pas toujours, même rarement, en leviers politiques équivalents. Qu’elles soient vues comme des « filles de la Province » (dixit Maurice Duplessis) ou de simples « créatures », les villes ont depuis leurs fondations eu à gérer une situation où les demandes sur leurs ressources dépassent de loin leurs capacités à fournir. Aussi, en tant que gouvernement essentiellement « administratif », il n’existe aucun moyen pour elles d’aller chercher, sans le consentement du « parent » provincial, les ressources financières qui seraient nécessaires pour répondre aux attentes croissantes et diversifiées de sa population. Et cette dernière qui n’y recherche pas moins, et avec raison, sa prospérité.

Mais alors, si une majorité de la population vie dans les centres urbains, pourquoi ceux-ci ne semblent pas faire plus de poids aux niveaux fédéral et provincial ? La représentativité parlementaire donne encore une voix disproportionnée aux régions et dilue grandement l’impact politique des villes. De plus, la constitution donne en exclusivité aux provinces le pouvoir de constituer (ou non), de former (ou non), de déléguer (ou non) un pouvoir à toutes municipalités, selon la manière dont elle l’entend et ceci, jusque dans la capacité de la faire disparaître. Envisager qu’une province puisse se départir volontairement d’un tel pouvoir est aussi impossible que, pour paraphraser une expression connue, d’envisager qu’une assemblée législative provinciale puisse scinder son territoire pour en exclure sa ville la plus productive et lui remettre les mêmes pouvoirs qu’une province.

Sur les traces d’Urban Nation

C’est pourtant le « suspension of disbelief » que nous demande de faire Alan Broadbent dans ce livre. L’analyse de la situation tragique et assez unique dans lequel se trouvent nos villes canadiennes, mais principalement les grandes villes-régions que sont Montréal, Toronto et Vancouver, est des plus justes et cinglantes. À l’échelle nationale, ces villes regroupent l’essentiel de la population et en sont évidemment les principaux engins des avancées sur le plan intellectuel, culturel et économique. Dans leurs provinces respectives, ces villes et leurs grandes régions sont les générateurs contemporains de la richesse et de la croissance pour une vaste partie de la population.

La question que tente ici de résoudre l’auteur est celle du canyon entre les villes comme centre de création polycentrique, multifonctionnel et pluridisciplinaire contemporain et le traitement infantilisant et régressif, sur le plan politique, dans lequel nos institutions cadrent ces entités urbaines. Ne devraient-elles pas disposer de pouvoirs au moins équivalents, ou du moins avoir la capacité d’acquérir un poids politique et contrôler leurs destinées avec la même aisance qu’une province ? L’auteur montre bien comment l’évolution de l’économie canadienne, qui est passé de pays qui, à sa fondation, en était un de régions-ressource, avec quelques villes de « contrôles » et industrielles, à fini par basculer, assez rapidement, vers une économie où le rôle de quelques villes-centre n’était plus en soutient à l’arrière-pays générateur de richesses, mais sont devenue elles-mêmes les principaux centres de la création de cette richesse. Mais à ce point, tous les pouvoirs étaient déjà entre les mains des provinces.

Malheureusement, s’il y a un domaine où l’on ne se laisse jamais convaincre par des arguments factuels ou des statistiques, aussi raisonné et pertinent qu’ils soient, ni hier ni aujourd’hui, c’est bien celui de nos institutions politiques. Surtout avec nos sensibilités toutes particulières et nos âpres jalousies de pouvoir, autant au Québec que dans les autres provinces. Ce livre a toutefois le mérite et le courage de proposer que nos villes puissent enfin exercer un pouvoir politique et décisionnel concomitant avec leurs importances. Pourquoi ne pas envisager ce monde, le temps d’une lecture ?

Le texte de cette revue a été publié le lundi 27 septembre 2021.

Tags Urban Nation, Alan Broadbent, Urban policy, Canada, Municipalisme

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