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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Abolir l'ère des créatures

April 4, 2024 John Voisine
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Libérer les villes—Pour une réforme du monde municipal. Maxime Pedneaud-Jobin, Les Éditions XYZ, Collection Réparation, 2023, 137 pages. Lu sur plateforme iBooks.

Une série sur les municipalités et la politique municipale au Québec [1 de 5]

On penserait qu’il serait plutôt facile de convaincre des gens comme nous, adjacents au monde municipal, que dans ce pays et cette province, il est temps d’enfin libérer les villes. Ces pauvres « créatures » de la province ne méritent-elle pas qu’on les dote d’un statut concomitant à leurs véritables fonctions de gouvernement, même du palier de gouvernement le plus proche du citoyen? Nos malheureuses cités et villes sont les « oubliés » de la constitution canadienne, laissée aux soins des provinces de les créer, si elles le veulent bien, et des garnir des pouvoirs qu’elles jugent appropriés. Le corollaire est, bien entendu, que les provinces peuvent aussi bien, du jour au lendemain, les dépouiller de ces mêmes pouvoirs. Elles peuvent de plus les dissoudre et effacer jusqu’à leurs existences toponymiques, comme plusieurs ont dû le vivre durant les fusions municipales du début du siècle.

Cette existence par procuration est pourtant une réalité assez universelle dans l’histoire des villes, autant ici, en Amérique du Nord, que dans le reste du monde. Si l’on fait exception de certaines cités-États, de quelques cités franches et de quelques principautés Européenne, toutes les entités urbaine, tous les territoires urbanisés ou « rurbain » doivent leurs existence à un état souverain qui lui est nécessairement, hiérarchiquement ou politiquement, supérieur. Selon les états, ce modèle fonctionne plus ou moins bien. Mais certainement, il donne toujours la possibilité à l’État d’avoir le dernier mot. Bien entendu, aucun État qui souhaite bénéficier d’une prospérité économique, appuyé par une vitalité intellectuelle et culturelle significative, ne va commencer à mettre des bâtons dans les rouages qui font tourner ses principales cités et villes. Il n’est toutefois pas rare de voir des États, qui sont la plupart du temps « provinciaux » dans tout ce que ce mot a de rétrograde, instituer des lois qui contraignent sérieusement les volontés plus progressistes de ses entités municipales. Près de chez nous, Montréal est l’exemple clé, avec un gouvernement provincial qui n’a de cesse de vouloir se faire du capital politique sur son dos, entre autres avec sur la question linguistique ou avec des mesures vexatoires adoptées sous le couvert fourbe de la laïcité (Loi 21). On ne mentionnera même pas la question du transport en commun, c’est trop douloureux. Dans la province voisine, Toronto est aussi la cible d’un gouvernement provincial hostile. Mais pour être honnête, même si ces deux métropoles étaient « libéré », il est difficile de concevoir comment ces dynamiques seraient évacuées.

Sur les traces de Libérez les villes…

Malgré un certain scepticisme qui ne nous quittera jamais vraiment tout au long de la lecture, accordons simplement les honneurs à Monsieur Maxime Pedneaud-Jobin, ancien maire de Gatineau. Il réussi dans cet opuscule à monter un argumentaire des plus convaincant pour cette cause louable de la « libération » des villes.

Il faut toutefois admettre plusieurs obstacles à faire ce type d’argument. L’auteur, en élidant ceux-ci, en essayant de les étouffer dans un silence sans écho, finit par dévaloriser les situations (nombreuses!) où une « libéralisation » serait de bon aloi. Montréal, Québec et même Laval auraient la capacité d’État-nation. Mais l’on ne doit pas oublier qu’il y a à peine 12 ans, Laval était depuis presque 25 ans sous l’emprise d’un maire qui plaidera coupable à des accusations de corruption, complot, fraude et gangstérisme. Montréal a aussi longtemps connu le règne d’un seul homme (sans la corruption, mais avec beaucoup de sclérose!). Combien d’autres administrations fonctionnent sous l’influence de « growth machines » locale ou régionale? En d’autres termes, il semble encore trop facile de faire une « capture » des instances municipales ou de les « détourner » de l’intérêt public. Dans les prochaines années, avec les situations difficiles qui vont surgir dû aux changements climatiques, cela ne va devenir que plus évident.

Cela dit, il est vrai que les villes doivent être libérées, pas vraiment de leurs conditions de « créatures », mais plutôt du cafouillis des lois et règlements qui les gouvernent. Comme le propose l’auteur, l’idée de mettre en place une « charte » des villes n’est pas vilaine et permettrait de constituer une base stable et pérenne. Une partie du travail a été fait par l’UMQ dans un livre blanc. L’auteur mentionne d’ailleurs qu’une des grandes difficultés des administrations municipales est de comprendre la gamme et l’étendue de leurs pouvoirs. Je suis de ceux qui analysent qu’elles en ont beaucoup, mais il n’est pas faux qu’avec la législation actuelle, il n’est pas facile de les cadrer. L’auteur aborde aussi la question des revenues, et sur ce point, je pense que le problème en est un de légitimité. Les municipalités ont de nombreuses sources de revenus potentielles (écofiscalité, loi 39, ententes, etc.), mais il est difficile de légitimer de nouvelles ponctions fiscales quand moins de 40 % des électeurs choisissent de voter aux élections municipales.

Pour le plaisir de la discussion et pour faire une propagande vigoureuse de la cause des villes, un livre à mettre dans toutes les mains.

Tags Libérez les villes, Maxime Pedneaud-Jobin, Administration municipale, Politique urbaine, Participation des citoyens, Série municipalité

La machine

March 21, 2024 John Voisine
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Urban Fortunes—The Political Economy of Place—With a New Preface—20th Anniversary Edition. John R. Logan & Harvey L. Molotch, University of California Press, 2007, 383 pages.

Cette chronique est un bonus dans notre série sur la ville de Los Angeles.

On imagine aisément que dans chaque ville, village, zone rurale, province ou pays, existent des groupes d’intérêts pour qui l’essor économique et un développement sans contraintes sont des impératifs de premier plan. Les chambres de commerce, sociétés de développement et autres clubs de croissance font leur travail en essayant de mousser les atouts locaux et régionaux auprès des entrepreneurs, producteurs et investisseurs potentiels sensibles à cette offre avantageuse. Dans le même sillage, le pouvoir politique de tous les paliers de gouvernement voit de façon positive le contrôle d’une région qui est reconnue en tant qu’engin de croissance et de prospérité pour ses commettants. Il peut donc parfois se développer une symbiose, qui peut vite devenir malsaine, entre l’élite politique et les groupes que les auteurs de l’ouvrage, par exemple, appellent la « machine de croissance » (The Growth Machine), dans toutes ses incarnations. Ainsi, la machine peut par défaut s’imposer comme seul interlocuteur écouté et entendu dans une conversation sur les options de développement et d’aménagement d’un territoire. La force de cette machine, ainsi que le démontrent les auteurs, est dans son habileté à monopoliser le message afin de le guider dans le sens de ses intérêts. Elle réussira même le plus souvent à les faire passer comme universel. Avec ce type de discours, une autre des forces rhétoriques de la growth machine est sa capacité à convaincre que la croissance est nécessairement synonyme de progrès économique et social pour les personnes défavorisées. Ou comme le veut l’aphorisme bien connu de la croissance, a rising tide lifts all boats.

L’axe argumentatif de la growth machine est d’autant plus puissant qu’il s’efface derrière une thèse englobante et « naturelle » qui le présente comme un bien en lui-même, sans autre besoin de justification. L’acceptation de ses vertus est si répandue qu’en essayant de pointer certaines failles dans son discours, on se trouve vite à plutôt devoir motiver les raisons de cette contestation. Ainsi, au lieu de susciter un questionnement opportun sur les mécanismes de mise en place et les bénéfices de la croissance, on est contraint d’expliquer le fait d’interroger l’idée même que le modèle de croissance proposé soit un apport positif net à la communauté d’accueil. Est-il vraiment si déraisonnable de demander qui a quoi? comment? à quel prix?, et surtout, en fin de compte, qui paye? En d’autres termes, de s’interroger sur la répartition légitime de la nouvelle richesse créée?

Sur les trace de Urban Fortunes

La réédition du livre était pour fêter ses 20 ans de parution, en 2007; nous sommes donc maintenant en 2024, à presque 40 ans de la date de publication d’origine et pourtant, il m’appert que le propos n’a rien perdu de son actualité et de sa pertinence. En fait, je suis même un peu contrarié que des concepts de base, comme la valeur de transaction (exchange value) et la valeur d’usage (use value), sur lesquelles repose l’essentiel de l’argumentaire des auteurs, ne fassent pas plus partie de nos enseignements en urbanisme. Il est clair que plusieurs des préceptes fournis par l’ouvrage trouvent leurs places quand vient le temps de décrypter un environnement urbain. Malheureusement, faute de gens (économistes, urbanistes, et ironiquement, aussi des entrepreneurs!) qui pourraient percer l’ubiquité du discours consensuel de la « growth machine », il existe toujours un aveuglement sur les opportunités laissées en friche par rapport à la richesse et qui tiendrait compte de la participation des gens en place. Une des rares figures contemporaines en urbanisme qui argumente en ce sens est curieusement un conservateur de tempérament, Chuck Marohn de Strong Towns.

En plus d’être, à moyen et long terme, un net négatif (les subventions, contributions et autres allègements fiscaux et de taxes finissent rarement par avoir un résultat positif), cette redistribution se concentre dans la poche de ceux qui possède déjà, pas ceux pour qui cette contribution viendrait changer la donnent. Il est difficile d’argumenter que cette stratégie, ces concessions sans véritable risque partagé rendu aux intérêts de la growth machine, entrainent des investissements frais dans l’économie locale.

Je pense que nos sociétés sont mûres pour une meilleure connaissance des manières de générer une expansion économique locale. Ce n’est pourtant nul autre que Jane Jacobs, dans The Economy of Cities [1], qui avait apporté la réponse la plus crédible. Cet ouvrage est trop peu lu et connu, selon moi. Mais le but des auteurs n’est pas de donner des instructions sur la construction d’une économie locale, mais plutôt de démontrer que les intérêts de la growth machine se concentrent en silo sur des valeurs purement transactionnelles, au détriment d’autres, comme l’usage. Un environnement urbain solide et pérenne est composé d’un complément équilibré des deux.

Rien de mieux que de s’ouvrir les yeux sur une situation qu’on avait un peu perdue de vue. Une lecture nécessaire qui choc juste là où il le faut, pour redémarrer le système.



[1] Jane Jacobs était d’ailleurs particulièrement fier de son travail sur cette question, comme elle en témoigne dans cette entrevue.

Tags Urban Fortunes, John R. Logan, Harvey L. Molotch, Sociologie urbaine, Politique urbaine, Série LA

Third time's a Charm

August 2, 2022 John Voisine
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Projet de politique métropolitaine d’habitation—Agir pour un Grand Montréal inclusif, attractif et résilient. Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), 2022, 60 pages.

Portrait de l’habitation dans le Grand Montréal. Cahiers Métropolitains, CMM, No 10, Mai 2022, 126 pages.

C’est en lisant ce dernier projet de politique métropolitaine d’habitation, produite par notre instance de gouvernance métropolitaine, la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), que j’ai découvert qu’il y avait déjà eu le Plan d’action métropolitain sur le logement social et abordable (PAMLSA) pour la période 2015-2020, produit sous l’égide de ce qui était alors appelé la Commission du logement social (CLS), maintenant la Commission de l’habitation et de la cohésion sociale (CHCS) (sic!). La CLS avait lancé les choses en grand, six ans plus tôt, avec un premier PAMLSA pour la période 2009-2013. Durant cette période, la CLS a même produit en 2012 un Répertoire des bonnes pratiques d’environ une centaine de pages sur «le rôle des municipalités dans le développement du logement social et abordable»*. Le document est même relativement agressif et complet sur ce qui est possible selon notre cadre législatif et les programmes en vigueur à l’époque, sans toutefois couvrir franchement la possibilité pour les municipalités de, comment dire, se taxer, produire et gérer en régie interne la diversité des logements nécessaires au maintien et à l’expansion de son dynamisme et pouvoir d’attraction en tant que municipalité.

Plus près de nous maintenant, la CMM semblait avoir changé de tactique, cette fois en proposant en septembre 2020 un Guide d’élaboration d’un règlement municipal visant à améliorer l’offre de logement social, abordable ou familial auquel on adjoint même un modèle de règlement municipal, pour faire bonne mesure. C’est certainement le dernier cri en incitation à la création de logements social et abordable pour les municipalités cherchant une couverture politique et un retrait matériel sur le plan de leurs responsabilités dans le domaine. Mais pour être certaine que l’on ne se trompe pas sur ses visées, la CMM lançait, en décembre 2021, sa Déclaration métropolitaine pour l’abordabilité du logement, intitulé Un toit pour tous au sein de milieux de vie complets dans la CMM, essentiellement un appel des élu(e)s de la CMM, dans le cadre de la production du Plan d’action gouvernemental pour l’habitation et la Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire (PNAAT) réitérant les demandes, restées sans réponse et stagnantes, des deux derniers PAMLSA.

Sur les traces du Projet

Le PAMLSA 2009-2013 a été suivi d’un bilan, ainsi que celui de 2015-2020, même si ce dernier est, incroyablement, inaccessible. Mais dans un État des besoins et du financement en logement social et abordable produit par la CMM en 2019, c’est comme si l’organe de gouvernance métropolitain admettait son impuissance. Cela ne surprend pas vraiment si l’on reconnaît que chaque PAMLSA a été concocté sous une nouvelle vague d’élu(e)s, qu’aucun de ces élu(e)s ne doit rien à la précédente équipe et constitue même une rupture idéologique et pratique assez marquée (de Monsieur Gérald Tremblay à Monsieur Denis Coderre, de Monsieur Coderre à Madame Valérie Plante), et il en va de même pour les élu(e)s sur l’ensemble du territoire de la CMM. De plus, il va sans dire qu’aucun de ces élu(e)s ne doit son poste à sa participation vigoureuse aux commissions de la CMM. Évidemment, on ne réglera pas ici le flou, probablement volontaire et entretenu, entourant la gouvernance métropolitaine, mais il explique pour beaucoup l’écart entre la qualité des documents produits et l’aura poussiéreuse qui s’attache à chacun d’eux.

C’est dans ce contexte que la CHCS propose maintenant une nouvelle approche, soit un projet de politique d’habitation, au lieu d’un plan d’action. Je ne suis pas certain du sens de ce changement; on peut simplement remarquer qu’une politique précède normalement un plan d’action, ce qui pourrait laisser entendre que la CMM va déléguer aux municipalités de son territoire le soin de préparer leurs plans d’action respectifs?

Plus spécifiquement sur le contenu, on nous sert la gamme des solutions consensuelles bien connues, délayées dans un bouillon liquide et sans saveur. Je suis sceptique par rapport à l’accent mis sur le développement autour des TOD (40 % maintenant et 60 % dans l’avenir), non parce que cela n’est pas une option avantageuse à long terme, mais parce que la réalité sur le terrain est que ces développements se révèlent plutôt être de type Car Dependent Transit, dixit Not Just Bikes. Rien pour se sortir de la dépendance automobile et augmenter l’offre de logements « pour tous au sein de milieux de vie complets dans la CMM ».

* J’ai découvert ensuite qu’il y en avait même un sur le soutien communautaire et l’aide à la personne en logement social et abordable.

Tags Communauté métropolitaine de Montréal, Politique urbaine, Politique métropolitaine, Habitation, Logements sociaux

La ville et ses limites

August 30, 2021 John Voisine
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City Limits. Paul E. Peterson, The University of Chicago Press, 1981, 268 pages.

S’il faut en croire les discours de plus en plus courants, les administrations municipales auront dans l’avenir (et ont déjà maintenant, parfois) des responsabilités qui ne cessent de s’accumuler. En plus des responsabilités de base, comme le contrôle de l’urbanisme, les inspections réglementaires, l’hygiène publique et la voirie, il faut en plus s’assurer maintenant d’avoir un environnement urbain résilient et préparer des contingences afin de faire face aux changements climatiques. Les administrations municipales doivent de plus se charger de ces responsabilités avec comme presque unique source de revenus la taxe foncière (et quelques miettes en frais de service). De plus, toujours en assurant de boucler le budget annuel sans faire de déficit. L’emprunt est aussi soumis à des paramètres stricts. Sur le plan de la gouvernance, les municipalités ne sont pas vraiment des gouvernements, autant dans leurs organisations que sur le plan de leurs statuts constitutionnels (c’est d’ailleurs la raison qu’il est plus exact de parler « d’administration municipale »). Comme les fusions au Québec (ou « l’amalgamation » de Toronto) l’ont bien démontré, il y a à peine une vingtaine d’années, les cités et villes de nos provinces ont bien peu de latitude, si un matin le gouvernement provincial décide de les encadrer autrement ou même de les rayer de la carte.

City Limits est écrit pour un contexte et un cadre spatio-temporel bien différents du nôtre, soit les États-Unis du début des années 1980. Les évènements (parfois traumatiques) de la fin des années 1960 étaient encore frais dans les mémoires. On pense aux émeutes raciales, au phénomène du « white flight », l’implantation des programmes découlant de la « Great Society », comme la « War on poverty » et la législation du Civil Rights Act, tous voté par le Congrès grâce à la persistance du président Lyndon. B. Johnson. Ce sont toutes là autant de mesures aux répercussions alors très contestées. Aussi, en 1975, le moment « Ford to City: Drop Dead » sera exploité autant par ceux qui y voyaient l’exemple de la déchéance urbaine (à droite), que par ceux qui espéraient ainsi (au centre et à gauche) recentrer les politiques sur une ville intrinsèquement riche en humanité et en ressources matérielles.

Sur les traces de City Limits

On pourrait donc penser que dans ce contexte si particulier, un lecteur canadien qui cherche à mieux comprendre ses « administrations » municipales n’y trouverait pas vraiment son compte. Mais l’approche de M. Paul E. Peterson, qui ce concentre sur les possibilités limites et les politiques communes que peuvent exercer de façon réaliste les administrations municipales, capture de façon assez universelle la nature et les limites de ce niveau de pouvoir dans une enceinte politique de type « fédéré », comme le Canada. Ainsi même si l’analyse contextuelle de l’auteur repose sur des données et des statistiques d’un autre pays (quoique toujours nord-américain) et d’une autre époque (certaines ont maintenant plus de soixante ans !), cela ne semble pas invalider les caractérisations sur le plan des « politiques urbaines » et de la « politique urbaine ». En tenant compte des ajustements inévitables qu’il faut assumer entre nos deux pays, la lecture en trois « limites » du possible des politiques urbaines, soit le développement (le « boosterism »), les « allocations » (les services de base d’une municipalité) et la redistribution (les services « sociaux » d’une ville), présentés en ordre croissant de difficulté, semble faire le tour des capacités consensuelles limites de la politique municipale. 

Là où le livre et son propos montrent vraiment leurs âges est sur la question du diagnostique des conséquences réelles des politiques qui visaient à réduire, limité drastiquement ou même effacer toute trace de « redistribution ». Loin d’être des freins à la création de la richesse collective (l’auteur pose ce constat comme une loi immuable), il est maintenant plus facilement reconnu qu’une redistribution éclairée est à la racine d’une cité créatrice de richesse. Un ouvrage récent comme The Sum of Us d’Heather McGhee illustre à quel point tout le monde perd quand cet aspect est négligé, surtout en contexte urbain.

Un autre problème avec un ouvrage publié en 1981 est que la vaste majorité des références sont maintenant inaccessibles ou sans objet. Mais il y en a deux qui vont mériter de se retrouver sur ma liste : Lonely Crowd, de David Riesman et de Richard Hofstadter, The Age of Reform, qui se trouvera justement à être commenté la semaine prochaine.

Tags City Limits, Paul E. Peterson, Politique urbaine, Pouvoir, Fédéralisme

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