• APPROCHE ET PRATIQUE
  • [ URBS + ]
  • [ VERDUN ]
  • [ OSU ]
  • CONTACT
Menu

Wellington | Fabrique urbaine

3516, rue Gertrude
Verdun, Québec H4G 1R3
514-761-1810
L'urbanisme en pratique

Your Custom Text Here

Wellington | Fabrique urbaine

  • APPROCHE ET PRATIQUE
  • [ URBS + ]
  • [ VERDUN ]
  • [ OSU ]
  • CONTACT

[ URBS + ]

URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Out There

April 8, 2022 John Voisine
CCF92248-3001-4CA5-9D5B-26AF9CDFAC14.jpeg 19FEAF6B-E98C-4E95-AABB-A8E2FD2A372B.jpeg D9B1FA2C-9C4A-45D0-8A1B-7A4A15156213.jpeg E2354D09-63B1-450C-8A69-D28992B6B137.jpeg

Borderland—Origins of the American Suburb, 1820-1939. John R. Stilgoe, Yale University Press, 1988, 353 pages.

Pour nous plonger un peu dans le matériel et le ton qui caractérise cette «préhistoire» de la banlieue américaine, John R. Stilgoe nous présente ce passage de Susan Cooper (Rural Hours), celle qu’on appelait la «witch-hazel» de cette nouvelle identité (le borderland) qui ne se réclame ni de la ville, ni de la campagne, ni de la banlieue, mais qui emprunte des éléments au trois : «We are the borderers of civilization in America, but borderers of the nineteenth century, when all distances are lessened, whether moral or physical.» Il y a beaucoup à décortiquer dans cette phrase, et l’auteur de ce livre est le guide parfait pour entreprendre cette balade, remplie de chemins inattendus, entre villes et frontières émergentes.

À la conquête de ce territoire alors souvent décadent et laissé en friche (slovenly farms—tel qu’ils étaient qualifiés à l’époque), on trouve justement un public citadin désespéré de s’imaginer transcender sa condition d’urbain, tenaillé par la nouvelle économie manufacturière et industrielle, prisonnier d’un capitalisme qui transforme sous ses yeux la ville en milieu hostile à cette famille bourgeoise, qui commence à demander mieux de la vie et qui en a les moyens. C’est face à cette situation et avec le développement de nouveaux moyens de mobilité (trains, tramway, omnibus) que, pour les plus fortunés, la perspective de nouveaux territoires, jusqu’alors impossible d’atteinte, s’ouvre et se développe sur une base régulière pour l’habitation. Ni vraiment du domaine de la banlieue (le plus souvent en continuité avec la ville), ni vraiment du domaine de la maison lointaine de vacance, la résidence du borderland trouve son sens dans sa capacité à faire oublié la ville, à rattacher ses résidents grâce à une mise en scène du naturel (improvements) et à recentrer l’existence des habitants de ce foyer nouveau genre du 19e, début 20e siècle.

Cette résidence borderland vient ainsi reconstruire le paysage de la périphérie des villes. Ce qui était le domaine de la «slovenly farm», parfois même abandonné, est repris en main par ce public urbain fortuné et motivé à faire revivre ce territoire selon des besoins contemporains qui lui sont propres.

Sur les traces de Borderland

Ce livre n’a pas comme objectif de démasquer toutes les causes de l’exode vers ces nouveaux borderlands, mais il aurait été difficile pour l’auteur de ne pas mentionner certains des facteurs qui incitait quelques jeunes ménages fortunés à passer leurs existences aussi loin de leurs centres d’activités professionnels. Puisqu’on parle bien ici de gens qui conservent un lien essentiel et quotidien (du moins pour l’homme du couple, mais aussi parfois pour elle) à la ville. L’auteur pointe vers une littérature populaire et popularisée par un riche éventail d’hebdomadaire et de mensuels qui vantaient les vertus curatives d’une vie loin du stress et des formes les plus débilitantes d’affliction nerveuses, touchant particulièrement les hommes. Pour la femme du couple, la résidence en borderland offre simultanément autonomie et intimité, l’occasion de construire une oasis réparatrice pour son homme et à leurs progénitures, le plus sain et stimulant des milieux, loin de la pollution urbaine. Parfois, le langage utilisé par les auteurs dans les périodiques est plus franc, comme cet article de 1906 dans Suburban Life, où l’on apprend que : «There is no race problem in Shenandoah—no colored people and no foreign population. There are no slums, no tenements, no double houses, and no shacks.» Une façon sans ambiguïté de décrire l’idéal borderland.

Mais pour être parfaitement honnête, les gens qui occupaient ce borderland ne voulaient aucunement se laisser associer à la caricature facile qu’en faisait certains contemporains, comme dans Main Street ou Babbitt de Sinclair Lewis. Loin d’être la frange réactionnaire face aux nouvelles réalités urbaines, l’auteur démontre, par son analyse particulière, que cette frontière se rattachait en plusieurs points aux façons les plus modernes de vivres l’urbanité. Les parallèles (absolument involontaire, puisque ce livre date de 1988) qu’il est possible de faire avec nos manières de vie contemporaine (en 2022) ne manquent jamais de faire réfléchir.

De la ferveur des come-outer en passant par les affligés du newyorkitis, des développeurs ayant eu l’audace et le courage d’entreprendre des modèles aussi différents que Forest Hills et Shaker Heights, Borderland est le livre qui nous fait imaginer, vivre et comprendre cette préhistoire de la banlieue.


La semaine prochaine, le troisième livre dans notre série sur la banlieue : Building Suburbia—Green Fields and Urban Growth, 1820–2000


Tags Borderland, John R. Stilgoe, Suburbs, Historique, Urban sociology

The Fight of Our Time

March 8, 2021 John Voisine
Fighting Traffic Fighting Traffic Fighting Traffic Fighting Traffic

Fighting Traffic—The Dawn of the Motor Age in the American City. Peter D. Norton, The MIT Press, 2008, 408 pages [lu en version ebook sur Kindle]

Des villes remplies de gens, de tous âges et de toutes conditions, qui vont à leurs affaires et qui s’affairent, dans les ports, dans les rues et sur les places, sur les avenues et les boulevards, en assumant chacun sa place, sans vraiment craindre d’y laisser la vie, cela est-il possible ? Si l’on regarde les nombreux films, maintenant facilement disponible sur le Web et montrant des scènes de rue des premières décennies du siècle dernier, c’est pourtant ce qui semble courant. Ces « vues animées » ont en commun une forte densité d’interaction humaine, quelques chariots à cheval, une belle présence de divers moyens de transport en commun et les « machines » automobiles qui devaient les remplacer tous. Mais à ce stade de l’histoire, il est encore difficile d’imaginer comment cette humanité finira par se faire balayer de la rue par l’automobile et ses acolytes.

Nous vivons pourtant dans cette version de l’univers urbain, où ces « machines automobiles » de tout genre ont fini par s’accaparer de l’environnement urbain. Le livre de M. Norton raconte comment le « motordom » (c’est ainsi que les manufacturiers et les entreprises autour de l’automobile des années 1920-30 aimaient à s’appeler) a fini par désarmer toute résistance à l’automobile comme moyen dominant de transport à l’échelle urbaine et au-delà. La résistance à l’emprise de l’automobile sur l’espace public, que ce soit sur les rues (largeur des voies, exclusivité) ou pour les accommodements (stationnements) a pourtant été énergique. Elle fut organisée par une diversité de représentants, autant des chambres de commerce que des groupes de citoyens, tous pour des motifs qui leur étaient propres (monopolisation de l’espace commercial urbain, dangers et accidents), mais tous mobilisé contre ces nouveaux intrus mécanisés.

Mais l’histoire racontée dans ce livre n’est évidemment pas celle du triomphe de ces groupes, mais bien plutôt celle du triomphe du motordom sur cette diversité d’intérêts urbains. Le triomphe fut d’ailleurs si total que le motordom réussit à effacer jusque la mémoire de cette résistance. Ce livre nous rappel qu’avec quelques changements de perspective, il est possible de faire changer une réalité dominante, même de celle qui s’exprime dans la forme urbaine. Il nous appartient maintenant de changer cette perspective.

Sur les traces de Fighting Traffic

Depuis la sortie de ce livre en 2008, l’auteur s’est fait entendre sur plusieurs tribunes et les thèses soutenues dans son ouvrage ont gagné en popularité. Cela vaut bien sûr pour la notion que l’introduction de l’automobile ne s’est pas faite « naturellement » dans la ville, mais aussi sur le fait que cela fut l’objet d’une chaude lutte entre les intérêts urbains, qui voulait dans la plupart des cas continuer à encourager une pluralité d’utilisation de l’espace public (les rues, les places, etc.) et les intérêts du motordom, qui ne pouvaient être assurés qu’en garantissant une domination totale de cet espace. Cette perspective fut diffusée à un vaste auditoire grâce au podcast 99 % Invisible. Pour le propos, les images et le film montrant la pluralité d’usagers des rues de San Francisco au tournant du 20e siècle. Toujours dans l’univers des podcasts, The War on Cars présentait récemment un épisode où l’auteur expose les origines frauduleuses de l’expression « America’s Love Affair With Cars ». Un autre mythe fabriqué pour avancer les intérêts étroits du motordom.

L’ouvrage ne comporte malheureusement pas de bibliographie autonome (les citations et références se trouvant dans les notes), et puisqu’il porte spécifiquement sur l’historique des transformations entre 1900 et 1935, la majorité du matériel cité est de cette même période. Un ouvrage qui pourrait toutefois être un complément à celui-ci (et cité dans les notes) est The Automobile Age. Semble être une référence sur l’industrie automobile aux États-Unis et son impact sur la société.

L’histoire du motordom c’est aussi l’histoire d’une certaine façon de gérer les affaires et de contrôler la production dans la grande industrie de masse. Une domination dans la gestion qui n’est probablement pas étrangère à l’hégémonie de l’industrie automobile sur l’économie et nos politiques. L’auteur cite deux ouvrages qui semblent pertinent dans cette veine, soit The Visible Hand—The Managerial Revolution in American Business, et sur celui dont le nom est devenue synonyme d’efficacité et de contrôle, The One Best Way—Frederick Winslow Taylor and the Enigma of Efficiency ; puisque l’on vit maintenant dans cette version de l’univers.

Tags Fighting Traffic, Peter D. Norton, Motordom, Automobile, Historique

514-761-1810

© 2017-2025 | Wellington | Fabrique urbaine | Urban Workshop inc.