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Wellington | Fabrique urbaine

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L'urbanisme en pratique

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URBS+ : Abréviation d’urbanisme, mais quand même un peu plus. Une revue hebdomadaire d’ouvrages et d’œuvres avec comme point commun un intérêt pour l’univers urbain, qui est aussi l’univers ultime de l’être humain.

Humilité professionnelle

February 9, 2023 John Voisine
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Confessions of a Recovering Engineer—Transportation for a Strong Town. Charles L. Marohn, Jr. Wiley, 2021, 249 pages. [e-book lu sur plateforme Kindle]

Cette chronique fait partie de notre série Trans&Transit [4/9]

Les gens qui sont familiers avec le travail «grass roots» du mouvement Strong Towns, commencé il y a plus de quinze ans comme un simple blogue du même nom, ne seront pas vraiment surpris de lire cette confession de l’ingénieur-fondateur de l’organisation et l’auteur de ce livre, Charles (Chuck) L. Marohn. Ce dernier y amène à maturité une réflexion qui trouve son origine dans les consultations de son bureau d’étude, confronté au monde de l’ingénierie municipal où tout devait se faire selon une convention qui lui semblait de moins en moins compatible avec la vraie raison d’être de nos agglomérations urbaines et rurales.

Dans une perspective Strong Towns (chaque chapitre se termine d’ailleurs avec une section intitulée «The Strong Towns Approach»), nos villes et villages doivent pouvoir compter sur des plateformes résilientes de création et de construction de la richesse. Cette «richesse» n’est pas celle, artificielle et extractive, qui se nourrit des calories vides de l’économie dépendante de l’automobile, autour des Big Box et des chaînes de fast-food en bordure d’une sortie d’autoroute. Les «power-center» et autres sources de développement instantanées sont autant de trous noirs; elles siphonnent l’économie locale et régionale de son entrepreneuriat avant de disparaitre sans avoir contribué à l’assiette fiscale à la hauteur des dépenses qu’elles imposent sur la région.

L’approche Strong Town mise plutôt sur la création de la richesse qui se fait lorsque les gens habitants d’une ville, d’un village ou d’une municipalité rurale trouvent les moyens de s’associer, de se parler et de développer des entreprises, des coopératives, des associations de commerces, de services, de production. Dans le meilleur des situations, celles-ci peuvent se développer de manière que cette richesse se révèle résiliente dans sa capacité à croître progressivement et graduellement, dans l’espace et dans le temps. Strong Towns vise une richesse collective construite sur des décennies et non d’entreprises cherchant à extraire un maximum de ressources locales sans rien laisser.

La base de cette plateforme de création de la richesse urbaine, selon l’approche Strong Towns, est simplement deux voies de communication aux caractéristiques bien distinctes : les rues (plateforme urbaine) et les routes (interurbaine).

Sur les traces de Confessions

Les confessions de cet ouvrage viennent donner un vocabulaire à l’observateur urbain qui constate, impuissant, le détournement des rues pour en faire des stroad (mot d’ailleurs inventé par l’auteur), des fossés de circulation qui ne fonctionnent plus en tant que rues, ni en tant que routes. Elles ne sont plus que des vecteurs d’anéantissement de la présence humaine, donc du potentiel de création de la richesse urbaine dans une perspective Strong Town. Les stroad sont partout devenu le standard du réseau routier, et chacun contribue, à sa manière, à la dévastation de l’espace urbain qu’il traverse.

Dans l’approche Strong Towns, les rues de nos villes et villages sont à la base de la construction de la richesse, entre autre en offrant aux terrains riverains la possibilité de devenir de véritable plateforme productive. Cela est rendu possible lorsque les gens, et non les automobiles, sont au centre de l’aménagement. C’est dans sa capacité dynamique de concentration des gens, dans ses rues et sur ses places, que l’on catalyse le mieux l’entreprenariat urbain. C’est alors qu’il devient productif de relié ces localités par des routes.

À première vue, cette approche Strong Towns semble faire fi de la complexité des réseaux routiers urbain et interurbain. Mais justement, une partie de la confession de Chuck Marohn consiste à montrer que cette complexité est factice, que ces aménagements de rues excluant toute autre modalité de déplacement que les automobiles (et le camionnage) sont loin d’être les seules solutions envisageables. Derrière un vocabulaire neutre d’efficacité et de productivité économique, c’est invariablement la logique automobile qui l’emporte, au détriment de toute autre considération légitime. En fait, pour comprendre à quoi ressemble un aménagement de rue qui enrichie l’environnement urbain dans une perspective Strong Town, le visionnement de cette vidéo est essentiel (Ben Hamilton-Baillie, RIP).

Ce dernier* ouvrage offre la version la plus complète de l’approche à la fois originale, profondément morale et conservatrice de Strong Towns. C’est une lecture qui nous ouvre sur cette vision fertile, riche en possibilité d’alliance pour un aménagement de l’espace urbain plus humain, créatrice d’une richesse vraiment locale, inclusive et partagée.


* Nous avions aussi fait la revue du premier vrai livre expliquant les valeurs du mouvement Strong Towns : Strong Towns : A Bottom-Up Revolution to Rebuild American Prosperity

Tags Confessions of a Recovering Engineer, Charles Marohn, Urban Transportation, American Cities, Engineering

Détournement local

October 31, 2022 John Voisine
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Segregation by Design—Local Politics and Inequality in American Cities. Jessica Trounstine, Cambridge University Press, 2018, 262 pages. Ebook lu sur l’application Kindle.

Les motifs profonds d’un phénomène sont aussi importants, sinon plus que ceux déclarés ou affirmés ouvertement. Surtout si ce dernier provoque des conséquences négatives reconnues, ou que les bénéficiaires d’une politique donnée ne se concentrent qu’à l’intérieur d’une tranche plutôt restreinte et déjà grandement avantagée de la population. Il faut alors se demander si les coûts du maintien de ces politiques sont congrus avec ses externalités sociales néfastes. Mais il devient d’autant plus difficile de faire la part des choses si le groupe sur lequel retombe la majorité des bénéfices a réussi à s’isoler et se protéger de ces externalités par la création d’un univers spatial, un territoire défendable où la perpétuation de ces avantages est considérée comme légitime, un droit naturel, démocratique et citoyen.

Le premier obstacle franchit de façon astucieuse et originale par Segregation by Design est justement de faire la démonstration que cette ségrégation by design existe, que sans une vigilance constante et active elle fini inextricable par s’ancrer dans tout phénomène contrôlé (réglementé) et qu’elle est le vrai moteur derrière la mise en place de ces politiques de maitrise ou d’exclusion du territoire et des biens publics. L’expression n’est jamais utilisée par l’auteure, mais la tâche à laquelle Madame Jessica Trounstine s’attelle dans son ouvrage est un peu l’équivalant, dans cette province, de faire la preuve du racisme systémique qui mine la mission de nos institutions publiques et de plusieurs de nos orientations législatives et réglementaires. Madame Trounstine ne cherche pas ici à démontrer qu’une municipalité spécifique, une agglomération métropolitaine, une politique ou qu’une manière de taxer (ou de ne pas taxer) découle de motifs explicitement ségrégationnistes. Elle fait toutefois le constat de la primauté qu’exerce la protection des valeurs immobilières (résidentiel privé) et à partir de ce constat, démontre que l’échafaudage réglementaire et les restrictions d’accès aux biens publics sont un des premiers remparts et gardiens de cette ségrégation institutionnelle au niveau local, municipal et métropolitain, avec tout ce que cela entraine comme discrimination systémique.

Nous nous trouvons dans une dynamique différente au Canada et au Québec, mais il est bon de lire comment cette frontière est parfois ténue.

Sur les traces de Segregation by Design

D’autant plus que, comme nous le verrons avec le prochain livre et comme l’auteure le montre dans cet ouvrage, le voile de légitimité de la démocratie locale qui recouvre ces concessions institutionnalisées que sont les municipalités est un phénomène assez exceptionnel dans notre culture politique. Voilà pourquoi les externalités négatives engendrées par la réglementation d’exclusion instituées par les municipalités passent sous le radar de tout contrepoids politique. Dans les circonstances, il est même assez difficile de faire le montage d’un portfolio réglementaire inclusif.

Comme démontré par Madame Trounstine dans l’ouvrage, à travers le dernier siècle et quart, la manifestation territoriale de la ségrégation a connu plusieurs échelles avant d’aboutir et de se solidifier, depuis le phénomène universel de la suburbanisation, à l’échelle municipale et métropolitaine. En s’appuyant sur une vaste littérature documentant les conséquences de la ségrégation dans l’espace (exclusion et crise du logement), sur le plan sociologique (dynamique raciale), économique (opportunités), politique (polarisation) et au niveau de l’accès à des biens publics de qualité, l’auteure rappelle que l’enjeu n’en est pas juste un de motivations déplacées, mais que l’extirpation des mécanismes perpétuant ces mécaniques d’exclusions est à la racine de tout avancement citoyen.

Ainsi pour démontrer que le système de gouvernance locale américain relève d’une ségrégation by design, l’auteure met à contribution les outils de l’analyse par régression statistique. Lorsque calibrés efficacement, ceux-ci permettent de faire ressortir des tendances et de les attribuer à un élément particulier; dans le cas à étude, à une volonté ségrégationniste à l’échelle municipale et se répercutant à l’échelle métropolitaine. C’est cette approche qualitative, combinée à une preuve quantitative, tournée vers la construction de questions aux solutions statistique, élaborée à partir de nombreuses variables (recensements, enquêtes, sondages, base de données) colligées pour de multiples villes et territoires à travers plusieurs décennies, qui donnent aux résultats présentés par Madame Trounstine une pertinence et une originalité qui trouve peu d’équivalant dans la littérature. C’était probablement le seul moyen de démontrer la nature «systémique» de cette ségrégation. Et pour ceux qui ont la chance de se faire entendre, cela donne une chance de reconstruire sur de nouvelles bases.

Tags Segregation by Design, Jessica Trounstine, American Cities, Local Politics, Segregation

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